Le quotidien Shargh, cible d’une campagne de harcèlement

Reporters sans frontières dénonce les manoeuvres d’intimidation orchestrées par le gouvernement et les médias proches des Gardiens de la révolution contre les journaux et journalistes en Iran. Le 26 septembre 2012, le quotidien réformateur Shargh a été suspendu, son directeur interpellé pendant quelques heures et un de ses caricaturistes convoqué par la justice. Quant à Ali Akbar Javanfekr, conseiller de Mahmoud Ahmadinejad et directeur de l’agence officielle Irna, il a été arrêté et renvoyé en prison pour purger une peine de six mois de prison ferme. “Le pouvoir iranien profite de la situation internationale et des débats engendrés par la diffusion de la vidéo ‘L’Innocence des musulmans’ pour s’en prendre aux médias et aux dessinateurs de son pays. La suspension de Shargh constitue un avertissement fort à la presse. L’arrestation du directeur de l’agence de presse officielle est la confirmation que les journaux et les journalistes sont toujours victimes de la guerre entre les différents clans au sommet du pouvoir”, a déclaré Reporters sans frontières. Dans son numéro du 24 septembre 2012, le quotidien réformateur Shargh a publié une caricature représentant des hommes se bandant les yeux. Le lendemain, les médias proches des Gardiens de la révolution, à la tête desquels Fars news, ont qualifié le dessin d’“insulte contre des combattants de la guerre”, faisant référence à la guerre Irak-Iran de 1980-1988. Depuis, les condamnations se succèdent. Dans un communiqué, plus de 120 députés ont demandé “une réaction ferme”. Mohammad Hosseini, ministre de la Culture et de l’Orientation islamique, a ouvertement pris position en demandant une “réunion d’urgence” de la Commission d'autorisation et de surveillance de la presse au sein de son ministère, n’hésitant pas à déclarer : “Nous sommes pour la fermeture du journal”. Plus tard dans l’après-midi, sur ordre de la même commission, le journal a été suspendu pour “insulte aux combattants de l’islam”; le dossier a été renvoyé devant la justice pour une poursuite judiciaire. Mehdi Rahmaniyan, directeur de Shargh, a été convoqué avant d’être placé en détention. Il a été libéré provisoirement en attendant la tenue de son procès, après le versement d’une caution de 50 millions de tomans (50 000 euros). Hadi Hideri, caricaturiste célèbre en Iran, et fils d’un vétéran de la guerre, a également été convoqué, malgré sa lettre d’explication dans laquelle il explique que son dessin “avait pour but de dénoncer l’ignorance dans le monde”. Ali Akbar Javanfekr, le directeur de groupe de presse Iran et de l’agence officielle Irna, a été arrêté sur son lieu de travail et transféré à la prison d’Evin. Ce conseiller de Mahmoud Ahmadinejad avait été condamné, le 20 novembre 2011, par la 76ème chambre du tribunal de Téhéran, à un an de prison ferme et trois ans d’interdiction d’exercer ses activités journalistiques, suite à la publication d’un supplément du quotidien Iran sur le tchador, le 13 août 2011, qui avait suscité une vive polémique et dont la diffusion avait été interdite. Cette condamnation avait finalement été réduite par la 36ème chambre de la cour d’appel à six mois de prison ferme. Selon l’Agence France-Presse, Ali Akbar Javanfekr "a été reconnu coupable d'avoir insulté le Guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, d'avoir publié des contenus contraires aux valeurs islamiques et à la morale publique".
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Updated on 20.01.2016