Le procès Politkovskaïa continuera sans complément d’enquête : “L’impunité règne en maître en Russie”

Le 7 août 2009, Nikolaï Tkatchouk, juge du tribunal militaire de Moscou, a ordonné la poursuite du procès en appel de trois suspects présumés dans l’assassinat de la journaliste Anna Politkovskaïa (photo Reuters), en dépit des demandes des parties civiles de renvoyer le dossier pour complément d’enquête, et du soutien du ministère public et de la défense à cette proposition. “Nous sommes accablés par l’incapacité de la justice russe à prouver sa détermination à élucider la mort de la journaliste. Quelques semaines seulement après le décès tragique de Natalia Estemirova, et alors que le troisième anniversaire de l’assassinat d’Anna Politkovskaïa approche à grands pas, il ne pouvait pas y avoir de pire choix. L’impunité règne désormais en maître en Russie”, a déclaré Reporters sans frontières. “Cette décision démontre, si besoin était, qu’il n’y a rien à attendre de ce procès en appel. Les multiples interrogations laissées en suspens par le procès en première instance ne trouveront pas de réponse. Ce processus judiciaire est désormais vidé de son sens, ramené à une simple formalité ”, a poursuivi l’organisation. Le 5 août 2009, le procès en appel de trois suspects accusés d’avoir contribué à organiser l’assassinat de la journaliste du bihebdomadaire Novaïa Gazeta s’est ouvert devant le tribunal militaire de Moscou, à la suite de la décision de la Cour suprême, le 25 juin, de répondre favorablement à l’appel interjeté par le parquet du verdict d’acquittement prononcé, le 19 février dernier, en première instance. Dès la première audience, les parties civiles avaient demandé le renvoi du dossier à des fins d’instructions complémentaires. Le parquet et la défense avaient soutenu cette initiative. La décision avait été renvoyée au 7 août. Le juge Nikolaï Tkatchouk a rendu publique sa décision de poursuivre le procès et a fixé au 7 septembre la prochaine audience, lors de laquelle le choix du jury d’assise sera effectué. Toutefois, le fils de la journaliste, Ilya Politkovskii a déclaré qu’il allait faire appel de cette décision. Depuis mars 2000, pas moins de 20 journalistes sont décédés en raison de leur activité professionnelle en Russie. Novaïa Gazeta a payé un tribut particulièrement lourd à ce climat de violence et d’impunité puisque quatre de ses journalistes figurent parmi les victimes. L’année 2009 a vu une recrudescence d’agressions particulièrement violentes, à l’encontre de la presse locale notamment. Enfin, les défenseurs des droits de l’homme sont eux aussi la cible d’assassinats, comme Stanislav Markelov, abattu le 19 janvier dernier, et Natalia Estemirova, enlevée et tuée le 15 juillet. La Russie figure à la 141e place du classement 2008 de la liberté de la presse publié par Reporters sans frontières. Ecouter l'interview d'Anna Politkovskaïa par Radio France Internationale