Le gouvernement israélien demande à la Suède de condamner un article jugé diffamatoire

Reporters sans frontières dénonce les tentatives de pression du gouvernement israélien sur le gouvernement suédois afin de censurer le quotidien suédois Aftonbladet, suite à la publication, le 17 août 2009, d’un article jugé diffamatoire. « Quel que soit le contenu de cet article, et même si nous comprenons qu’il ait pu engendrer de la colère au sein de l’opinion publique israélienne, le gouvernement israélien devrait s'abstenir de demander à son homologue suédois d'intervenir. Aftonbladet est seul responsable du contenu des articles publiés, pas le gouvernement suédois. Si les autorités israéliennes estiment que l’image de leur pays est salie, elles peuvent utiliser la voie judiciaire. Sanctionner administrativement le journaliste auteur du reportage est la mauvaise solution », a déclaré l’organisation. Le 17 août 2009, le quotidien suédois Aftonbladet a publié un article intitulé « Nos enfants sont dépouillés de leurs organes », accusant l’armée israélienne de couvrir un trafic d’organes prélevés sur des Palestiniens tués. L’article évoque un « trafic d’organes » se déroulant « avec la bienveillance des autorités » israéliennes. Le journaliste Donald Boström se basait sur une interview de proches d’un jeune Palestinien tué en mai 1992, et dont le corps aurait été transporté par hélicoptère en Israël. Lorsque le corps leur avait été rendu quelques jours plus tard, le frère de la victime avait dit être convaincu que des organes avaient été volés. Dans un communiqué de presse du 20 août 2009, Ehud Barak, ministre israélien de la Défense, a considéré le contenu de l’article de « calomnie écœurante », n’hésitant pas à le qualifier d’antisémite. Le 20 août, l’ambassadrice de Suède en Israël, Elisabet Borsiin Bonnier, a déclaré partager « le malaise éprouvé par les représentants du gouvernement, les médias et l’opinion publique en Israël », et avait réprouvé l’article, ajoutant qu’il « choquait et écœurait aussi bien les Suédois que les Israéliens ». Mais le ministère suédois des Affaires étrangères s’était abstenu de condamner l’article incriminé. Le ministre des Affaires étrangères suédois, Carl Bildt, a désapprouvé les déclarations de son ambassadrice, rappelant son attachement au principe de la liberté d’expression. Au cours d’une conférence de presse organisée le 21 août 2009 à Reykjavik en Islande, il a déclaré que « en tant que membre du gouvernement suédois et en vertu de la Constitution suédoise, je dois respecter la liberté d’expression, quel que soit l’avis personnel que je porte sur ce qui est publié ça et là dans les médias suédois ». Avidgor Lieberman, ministre israélien des Affaires étrangères, a vivement réagi à ce refus du gouvenement suédois de critiquer l’article d’Aftonbladet. Le 22 août 2009, son porte-parole a accusé les autorités suédoises d’utiliser le principe de liberté d’expression comme « prétexte commode pour ne pas condamner l’antisémitisme ». A l’issue du Conseil des ministres hebdomadaire, le 23 août, le Premier ministre israélien a déclaré : « Nous ne demandons pas des excuses du gouvernement suédois, nous voulons de sa part une condamnation (de l’article). » En guise de rétorsion, le chef du bureau de presse gouvernemental (GPO), Daniel Seaman, a refusé d’accorder des accréditations à deux journalistes du journal Aftonbladet. Suite à la publication de son article, Donald Boström déclare avoir reçu deux lettres contenant des menaces de mort. Ces tensions diplomatiques entre les deux pays interviennent à dix jours de la visite officielle du chef de la diplomatie suédoise en Israël. Depuis le 1er juillet 2009, la Suède exerce la présidence tournante de l’Union européenne.
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Updated on 20.01.2016