Charles Kabonero, directeur de l'hebdomadaire Umuseso, a été relaxé du chef d'accusation de "divisionnisme", pour lequel il risquait d'être condamné à une lourde peine de prison et à une amende exorbitante. Il n'a finalement été condamné que pour "atteinte à la dignité d'une haute autorité" à une amende moindre dans un procès intenté par le vice-président du parlement.
Charles Kabonero, directeur du principal hebdomadaire indépendant rwandais Umuseso, n'a pas été condamné à une peine de prison. L'accusation de "divisionnisme" portée contre lui a été rejetée, lors du rendu du verdict de son procès le 23 novembre. En revanche, il a été reconnu coupable « de diffamation et d'atteinte à la dignité d'une haute autorité », en la personne de Denis Polisi, vice-président du Parlement.
« Si nous saluons la relaxe de Charles Kabonero et le rejet de l'accusation de divisionnisme, nous espérons que Denis Polisi ne fera pas appel et demandons que le journal Umuseso puisse désormais paraître en paix, a déclaré Reporters sans frontières. La sentence, applaudie par une forte couverture médiatique et un public solidaire, devrait ouvrir la voie à une réforme du code la presse rwandais, intrinsèque de l'existence de médias libres dans le pays », a ajouté l'organisation.
Le tribunal a condamné Charles Kabonero pour le deuxième chef d'accusation qu'il a considéré comme le plus grave. Il devra donc verser un franc rwandais symbolique au tribunal et payer une amende de 8 600 RWF (environ 13 € ) pour « atteinte à la dignité d'une haute autorité ».
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17.11.2004Quatre ans de prison requis pour une analyse politique
Le directeur du principal hebdomadaire indépendant rwandais Umuseso, Charles Kabonero, est menacé d'être condamné à une lourde peine de prison et à une amende exorbitante, après avoir été attaqué en justice par le vice-président du Parlement pour l'un de ses articles.
Ce dernier s'est constitué partie civile dans un procès intenté après la parution d'un article évoquant l'influence de son réseau d'amitiés dans le panorama politique rwandais et les ambitions auxquelles cette influence pourraient lui faire prétendre. Le 16 novembre, le parquet de Kigali a requis à l'encontre de Charles Kabonero une peine de quatre ans de prison et une amende de 50 millions de francs rwandais (environ 70 000 euros). Le verdict sera rendu le 23 novembre.
« La justice rwandaise doit impérativement prendre la mesure de l'aberration à laquelle est confronté Charles Kabonero, a déclaré Reporters sans frontières. Mardi, ce journaliste risque d'être emprisonné pour avoir rédigé une analyse politique dans l'hebdomadaire qu'il dirige, même si le tribunal prononce une peine plus légère que celle requise par l'avocat général. Pour un gouvernement qui se targue de respecter la liberté de la presse, cette situation est scandaleuse. »
« L'affaire Umuseso devrait être le signal qu'il est temps de dépénaliser les délits de presse, au Rwanda comme ailleurs, a ajouté l'organisation. L'accusation de 'divisionnisme', notamment, est très grave dans un pays aussi meurtri que le Rwanda et ne s'applique absolument pas dans ce cas. Nous espérons que le tribunal comprendra que jeter un journaliste en prison pour avoir écrit un article qui a déplu au pouvoir est disproportionné. »
Le directeur d'Umuseso est poursuivi par Denis Polisi, vice-président du Parlement et secrétaire général du FPR (au pouvoir) pour « divisionnisme », « atteinte à la dignité d'une haute autorité » et « diffamation », devant le tribunal du district de Nyarugenge (Kigali). Le plaignant se réfère à un article paru dans le numéro 186 de l'hebdomadaire Umuseso du 1er au 7 août 2004, intitulé : « Entre Kagame (le président du Rwanda) et Polisi, qui gouverne réellement ? » L'article jaugeait, entre autres, le poids politique de Denis Polisi à la lumière de sa position de secrétaire général du parti au pouvoir et d'ancien membre de la diaspora tutsi réfugiée au Burundi. Charles Kabonero révélait également que Denis Polisi louait des bureaux à plusieurs institutions paraétatiques dans un immeuble de sa propriété.
Saisi par le ministre de l'Information le 18 août, le Haut Conseil de la presse (HCP) avait exigé de Charles Kabonero qu'il « reconnaisse ses fautes », publie un rectificatif et révèle ses sources. Devant le refus de l'équipe dirigeante d'Umuseso, le HCP avait recommandé, le 13 septembre, la suspension pour quatre mois de l'hebdomadaire. Estimant qu'il ne pouvait empiéter sur une procédure judiciaire, le ministre n'avait pas suivi cet avis.
Umuseso a déjà fait l'objet d'arrestations et de saisies arbitraires ces dernières années. L'un de ses journalistes, Tharcisse Semana, a été contraint à l'exil le 26 août, pour échapper à de mystérieux poursuivants et à des actes d'intimidation répétés.