Le caricaturiste politique Zunar attend réparation; le gouvernement opprime les dessinateurs
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Le 23 juillet 2012 aura lieu l’audience finale du procès intenté par le caricaturiste Zulkiflee Anwar Haque, plus connu sous le nom de Zunar, contre l’État malaisien pour “détention illégale”. Reporters sans frontières attend un verdict juste, reconnaissant l’illégalité du traitement subi par Zunar. Cette décision de justice prend d’autant plus d’importance dans l’actuel climat préélectoral.
“A l’approche des élections législatives, la décision de la Commission électorale d’interdire les caricatures pendant la campagne, soit 14 jours avant les élections, trahit l’intolérance du pouvoir envers la critique à son égard”, a déclaré Reporters sans frontières.
“Les dessins humoristiques sont l’un des composants indispensables d’une presse libre. Il est important que le rôle des caricaturistes politiques ne soit pas remis en question et que ces derniers ne soient pas la cible de menaces de détentions et de perquisitions, comme cela a été le cas pour Zunar, en septembre 2010. Nous attendons du verdict du 23 juillet qu’il rende justice au caricaturiste et que l’illégalité de son arrestation et de la confiscation de ses ouvrages soit enfin reconnue”, a ajouté l’organisation.
Zunar a entamé une action en justice contre la police et l’État malaisien pour les pertes matérielles et la détention illégale qu’il a subies en 2010. Le 24 septembre 2010, des policiers ont perquisitionné ses bureaux, saisi 66 copies de son ouvrage "Cartoon-o-phobia", qui devait sortir le jour même. Suspecté de “sédition”, le caricaturiste avait été détenu pendant un jour dans le cadre d’une enquête judiciaire. En cas de jugement favorable à la défense, le caricaturiste pourrait être obligé de payer jusqu’à 40 000 ringgit (environ 10 000 euro).
Entre temps, à la veille des élections législatives, Zunar a repris son combat contre la politique de censure du gouvernement malaisien. Sous son égide, un groupe de caricaturistes, le Kumpulan Kartunis Independent (KKI), s’est engagé à mener une campagne de dessins humoristiques portant sur les scandales gouvernementaux. Malgré l'interdiction gouvernementale, des caricatures seront diffusées durant les 14 jours qui constituent la période officielle de campagne électorale, et ce jusqu’à la tenue des élections, dont la date n’a pas encore été fixée. Nor Azlin Ngah (Jonos), Azmie Md Taha, Johnny Ong, Azman Md Noh (AMN), Nor Afendi Ramli (Ronasina) et Amir Hakim (Ahyat) comptent parmi les dessinateurs participant au projet.
L’une des cibles principales de leurs caricatures est le scandale de corruption lié à la vente, en 2002, de sous-marins français de classe “Scorpène” à la Malaisie. L’affaire, actuellement traitée par la justice française, implique notamment le premier ministre malaisien, Najib Razak.
Le Kumpulan Kartunis Independent s’oppose ouvertement à l’interdiction des caricatures en période de campagne préélectorale, promulguée, le 30 mai 2012, par la Commission électorale de Malaisie. Cette mesure politique, basée sur la section 4A de la Loi sur les Élections de 1958, menace les contrevenants d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à cinq ans et/ou d’une amende jusqu’à 10 000 ringgit (environ 2 500 euro).
“L’interdiction des caricatures avant les élections est ridicule et absurde. La caricature est un moyen d’expression tout à fait légal en Malaisie. La Commission électorale n’a pas le droit de l’interdire. (...) J’ai le devoir, en tant que caricaturiste, de dénoncer les affaires de corruption, les mauvaises pratiques, les gaspillages de fonds publics et les injustices de la part du gouvernement. L’interdiction imposée par le gouvernement malaisien est en contradiction avec la liberté d’expression, garantie pour tous les citoyens par la Constitution malaisienne. Il s’agit également d’une tentative de museler les critiques et les voix dissidentes”, a déclaré publiquement Zunar.
En 2011, Zunar a reçu le Prix "2011 Courage In Editorial Cartoon", remis par l’organisation Cartoonist Rights Network International. Ses cinq ouvrages de caricatures sont actuellement interdits en Malaisie, en vertu du Printing Presses and Publications Act. En juillet 2010, le caricaturiste a intenté une action en justice contre cette interdiction, mais elle a été rejetée.
Publié le
Updated on
20.01.2016