La loi contre le racisme toujours au cœur d’une importante mobilisation des syndicats de journalistes
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C’est aujourd’hui, 15 novembre, que prend fin une vaste collecte de signatures, entreprise par certains syndicats de journalistes, pour solliciter auprès du Parlement la modification de la loi 045 contre le racisme et toute forme de discrimination, promulguée le 8 octobre 2010. A la date du 7 novembre dernier, 700 000 signatures ont été recueillies selon les initiateurs de la pétition. Deux articles de la nouvelle législation suscitent depuis l’origine méfiance et inquiétude au sein de la profession.
Parallèlement à cette pétition, le gouvernement a accéléré les tables de consultation de la société civile organisées pour réglementer ladite loi. Or, la plupart des organismes professionnels ont décidé ne pas prendre part à la discussion. Un observatoire des médias a été spécialement créé pour suivre les plaintes éventuelles contre des journalistes ou des médias à l’appui de la loi.
Reporters sans frontières n’a jamais contesté le principe général d’une loi qui se justifie par le contexte politique qu’a récemment connu la Bolivie. Néanmoins, nous avions recommandé des modifications destinées à parer à toute ambigüité dans l’application de la loi, en particulier celle de l’article 16 prévoyant notamment des mesures de suspension pour les médias qui “autoriseraient ou publieraient des idées racistes et discriminatoires”. Nous avions suggéré que la sanction s’applique à des “médias qui font explicitement l’apologie du racisme et de la discrimination”. L’Association mondiale des radios communautaires (AMARC) s’était prononcée dans le même sens.
Les discussions engagées par le gouvernement autour de la réglementation de la loi sont en elles-mêmes positives. Malheureusement, nous constatons que la nouvelle législation a commencé à s’appliquer sans que sa formulation controversée ne soit clarifiée au préalable. Nos craintes se confirment avec les affaires en cours. Une loi mal formulée et mal appliquée risque de manquer son but et d’être délégitimée.
Un premier cas, signalé à Potosí, concerne les poursuites intentées par l’ancienne secrétaire de la Fédération des paysannes contre le présentateur de l’émission “El Variadito”, José Luis Apacani. Au cours du programme, diffusé en direct, un spectateur avait qualifié la plaignante de “face de lama” (terme raciste utilisé contre les populations indigènes de l’Altiplano). Les propriétaires de la chaine privée Canal 33 ont décidé de suspendre l’émission : “Il s’agit d’une preuve de négligence de la part du journaliste. Nous lui avions dit de ne pas prendre d’appels téléphoniques, mais il a désobéi.” Apparaît ici le problème posé par les termes de la loi quant à la responsabilité des médias. En l’occurrence, Canal 33 et son animateur n’ont pas appelé au racisme, même si le propos du téléspectateur est effectivement condamnable. La confusion juridique risque de produire de l’autocensure, comme on le voit.
Un second cas concerne le quotidien La Patria contre lequel des élus de la région d’Oruro ont annoncé qu’ils porteraient plainte. Dans un article en date du 9 septembre, le quotidien faisait référence à ces derniers sous le terme de “concejiles” (“petits conseillers”, au lieu de “concejales”), mot que les législateurs ont jugé “discriminatoire”. Cette fois, le délit paraît nettement moins constitué et un autre problème tient à la non-rétroactivité d’une loi, qui doit normalement s’appliquer dans des cas postérieurs à sa promulgation.
(Photo : La Prensa)
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20.01.2016