La liberté de la presse toujours opprimée, dans le cadre d'une insécurité croissante

Reporters sans frontières exprime sa préoccupation devant les atteintes multiples à la liberté de la presse au Nigeria et l'insécurité croissante dans laquelle les journalistes doivent travailler, tout particulièrement dans les provinces du pays. Haruna Acheneje, correspondant du journal The Punch à Akwa Ibom (sud du pays), se trouve sous le coup d'un ordre d'expulsion voté par l'assemblée de l'Etat d'Akwa Ibom. A Port Harcourt (sud du pays), Lawson Heyford, journaliste du magazine The Source, a été arrêté par la police et détenu pendant plusieurs jours, de manière arbitraire, tandis qu'une équipe de télévision de la Nigerian Television Authority (NTA) a été attaquée par des policiers à Abuja (centre du pays), alors qu'elle tentait de filmer une confrontation entre policiers et officiers militaires. "Nous sommes consternés par l'adoption de cet ordre d'expulsion à l'encontre d'un journaliste dont le seul tort est d'avoir écrit un article. Nous demandons instamment le retrait de cette mesure inacceptable et appelons les autorités fédérales à la condamner fermement", a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières. L'organisation a également appelé les autorités à garantir aux journalistes un plus grand niveau de sécurité dans les provinces du pays et à ne pas laisser s'installer l'impunité pour les auteurs d'abus et de dérives. "Les enquêtes lancées sur des agressions ou des arrestations arbitraires doivent être menées jusqu'à leur terme pour permettre d'identifier les personnes responsables et les sanctionner", a-t-elle insisté. Dans l'édition du 11 août, Haruna Acheneje avait fait état de la grogne des membres de l'assemblée locale à l'égard du gouvernement fédéral, suite au non-paiement de leurs indemnités. Estimant que l'article est faux et qu'il constitue une tentative de semer le trouble, les parlementaires locaux ont convoqué le journaliste pour lui demander des explications. Mais ce dernier ne s'est pas présenté et leur a demandé de contacter le siège à Lagos. L'assemblée a alors voté, le 15 août, un ultimatum de sept jours le sommant de quitter le territoire de l'Etat. A son expiration, ils ont adopté un ordre d'expulsion à son encontre. Le même jour, trois inconnus armés ont pénétré dans ses bureaux et procédé à une fouille des lieux, alors que le journaliste était absent. Le lendemain, le reporter a reçu à son domicile deux paquets suspects, qu'il a déposés à la police, par crainte pour sa sécurité. En 1986, Dele Giwa, rédacteur en chef du magazine Newswatch, avait été tué en ouvrant un colis piégé à son domicile. Par ailleurs, Lawson Heyford a été arrêté, le 22 août, par la police, qui n'a donné aucune explication sur les raisons de cette interpellation. Il a ensuite été détenu dans les locaux du Département fédéral d'investigations criminelles (FCID) à Lagos et n'a été libéré que le 26 août. Le journaliste a été interrogé sur un article portant sur un conflit interclanique dans le village d'Ataba (sud du pays), qui avait fait plusieurs morts. Il y avait nommément accusé certaines personnes de porter une responsabilité dans ce drame. Reporters sans frontières rappelle également que Mohammed Labbo et Abdullahi Abdullahi, respectivement reporter et cameraman à la NTA, ont été brutalisés par des policiers le 14 août dernier, alors qu'ils voulaient couvrir des violences entre la police et des officiers militaires. Abdullahi Abdullahi avait reçu des coups de crosse à la tête et sa caméra avait été endommagée. Une enquête a été ouverte par le ministre des Affaires policières, mais n'a pour l'instant abouti à aucun résultat concret.
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Updated on 20.01.2016