Le 25 janvier 2005, le tribunal de Sidi M'hamed à Alger a requis de lourdes peines à l'encontre de huit journalistes et quatre rédactions dans différentes affaires. Reporters sans frontières exprime son indignation devant l'indifférence des autorités algériennes face aux mesures judiciaires répressives auxquelles est confrontée la presse ces derniers mois.
Reporters sans frontières exprime toute son indignation face au soutien des autorités algériennes à la mise au pas de la presse par la justice. Le 25 janvier 2005, le tribunal de Sidi M'hamed, à Alger, a requis la suspension d'un journal et condamné des journalistes à des peines de prison et à de lourdes amendes.
Reporters sans frontières dénonce fermement le recours à des peines d'emprisonnement dans des affaires de diffamation et demande aux autorités algériennes une réforme du code pénal afin de dépénaliser les délits de presse. Pour rappel, l'article 144 bis du code pénal prévoit des peines de deux à douze mois de prison et des amendes pour toute mise en cause du président de la République dans des termes injurieux, insultants ou diffamatoires.
L'organisation demande le rejet de la demande de suspension de six mois requise par le parquet à l'encontre du quotidien Le Soir d'Algérie, alors que le code de la presse ne prévoit pas de peines de suspension en cas de diffamation.
« Nous sommes révoltés par l'indifférence des autorités algériennes face aux mesures judiciaires répressives auxquelles est confrontée la presse ces derniers mois. Les récentes condamnations de journalistes à des peines de prison ferme ou avec sursis, les lourdes amendes infligées à des publications et les menaces de suspension qui pèsent sur certains quotidiens témoignent d'une véritable volonté de mise au pas de la presse en Algérie. Ce triste tableau ne reflète pas le « remarquable développement de la presse » dont se targuent les autorités, qui déclarent avoir une des presses « les plus libres dans le tiers-monde », a déclaré Reporters sans frontières.
Une pléiade de condamnations
Le 25 janvier, le procureur du tribunal de Sidi M'hamed a requis une peine de six mois de suspension contre le quotidien Le soir d'Algérie et six mois de prison ferme ainsi qu'une amende de 50 000 DA (530 euros) à l'encontre du directeur de publication, Fouad Boughanem, pour « diffamation ».
C'est à la suite d'un article, publié en 2001 dans la rubrique « Soir corruption » que deux membres de la Banque de développement local (BDL) ont porté plainte contre le journal. L'ensemble de la profession s'est élevé pour exprimer son indignation mais également sa peur. Me Bourayou, avocat de la défense, a déclaré : « La décision de la suspension est très grave. Cela veut tout simplement dire qu'aujourd'hui aucun journal n'est à l'abri. Je ne conteste pas que l'exercice de la profession doit se faire dans le respect des lois, mais il est inquiétant de constater que, pour une simple affaire de diffamation, le parquet requiert la suspension d'un journal. » Le verdict sera prononcé le 22 février 2005.
Dans une autre affaire, l'ancien directeur de publication du quotidien Liberté, Farid Alilat, ainsi qu'un ancien journaliste de la rédaction, Rédha Belhadjoudja, et Hakim Laalam, chroniqueur au Soir d'Algérie, ont été condamnés à six mois de prison avec sursis et à payer une amende de 250 000 DA chacun (2 700 euros) pour « propos diffamatoires contre le président de la République ». Fouad Boughanem a été relaxé. La procédure judiciaire avait été déclenchée à la suite de la publication d'un article dans le quotidien Liberté en solidarité avec cinq journaux empêchés de paraître en été 2003.
Le même tribunal a prononcé des peines de six mois de prison avec sursis et exigé le versement de 3 millions DA (32 000 euros) en dommages et intérêts ainsi qu'une amende de 50 000 DA (530 euros) contre Ali Djerri, directeur du quotidien El khabar, Omar Belhouchet, directeur de publication du quotidien francophone El Watan et la journaliste Salima Tlemçani. La Direction générale de la sûreté nationale (DGSN) a poursuivi en justice les deux quotidiens pour « diffamation » suite à la publication d'une lettre qui émanerait d'officiers de police dans laquelle ils dénonçaient les « agissements » du directeur général de la DGSN et de son secrétaire général. Lors du procès, les prévenus ont refusé de révéler leurs sources.
Ali Djerri a été condamné dans une autre affaire l'opposant au ministère de l'Agriculture à une peine de deux mois de prison avec sursis et au versement d'une amende de 50 000 DA (530 euros) et d'un dinar symbolique en dommages et intérêts pour « diffamation ».
Ce même tribunal a condamné un autre journaliste du Soir d'Algérie, Zoubir Souissi, à verser 50 000 DA d'amende (530 euros) et 200 000 DA (2 100 euros) de dommages et intérêts pour « diffamation » dans une affaire l'opposant à un cadre de la BDL.