L’ouverture en direction de la communauté kurde doit également bénéficier à la liberté de la presse

Deux médias défenseurs des droits kurdes, le quotidien Günlük et l’hebdomadaire Özgür Ortam, ont été suspendus de publication pour une période d’un mois, à la fin du mois d’août 2009 sur décision de justice, en raison d’articles que la justice d’Istanbul a considérés comme étant de la "propagande pour la cause kurde". Ceci, au moment même où le gouvernement turc assure œuvrer à une résolution pacifique du conflit identitaire kurde qui ensanglante le pays depuis vingt-cinq ans. "Nous condamnons fermement les suspensions de Günlük et d’Özgür Ortam. Nous demandons à la justice turque de lever ces interdictions et de cesser de harceler les médias qui traitent de la question kurde de manière indépendante ou militante. Dans une démocratie, la liberté d’opinion est fondamentale et seuls les appels à la violence et à la haine sont condamnables", a déclaré l’organisation. "La résolution pacifique du conflit est impossible si les autorités continuent de censurer les médias qui s’intéressent au sujet. La société turque a le droit de disposer d’une information indépendante et plurielle. En ce moment, des efforts de la part du gouvernement turc ont lieu sur la question kurde, ils doivent également concerner la liberté d’expression", a conclu Reporters sans frontières. Le 22 août, la cour d’assises n°13 d’Istanbul a suspendu le quotidien Günlük en vertu de l’alinéa 2 de l’article 7 de la Loi antiterroriste 3713, entrée en vigueur en 1991, pour la publication d’articles considérés comme de la propagande en faveur du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan classé par la Turquie et l’Union européenne parmi les mouvements terroristes). Cette sanction fait suite à la publication d’un éditorial rédigé par Amir Hassanpour, professeur au Département des civilisations proche et moyen-orientales de l’université de Toronto. Ce linguiste émérite parle fréquemment des pressions que subit la minorité kurde en Turquie. La directrice de la publication, Filiz Koçali, s’est indignée de cette décision "injuste" et s’est étonnée que celle-ci soit survenue au lendemain d’une réunion du Conseil de sécurité nationale à l’issue de laquelle le gouvernement a déclaré publiquement que l’ "ouverture kurde" allait se poursuivre. La journaliste a déclaré qu’ "il ne sera pas possible de parler de processus d’ouverture démocratique là où l’on n’accorde pas la parole aux Kurdes". En outre, quatre employés du quotidien doivent comparaître dans les prochains mois devant la justice à Istanbul. Il s’agit de Filiz Koçali, du propriétaire du journal Ziya Ciçekçi, de l’éditeur Yüksel Genç et du chroniqueur Veysi Sarisözen, passibles de cinq ans de prison en vertu de la loi antiterroriste. Les journalistes sont poursuivis pour avoir publié, aux mois d’avril et de juin 2009, des articles et des images suspectés de faire la "propagande de l'organisation du PKK". En réaction, les employés de Günlük ont décidé de publier un nouveau journal, intitulé Demokratik Açilim (Ouverture démocratique), pendant la durée de la suspension du quotidien. Par ailleurs, le 25 août, la cour d’assises n°10 d’Istanbul a ordonné la suspension, pendant un mois, de l’hebdomadaire Özgür Ortam pour des motifs similaires. La cour a estimé que dans une édition du 17 août, l’hebdomadaire faisait de la propagande pour le PKK dans deux articles portant sur le début de la rébellion armée kurde, le 15 août 1984. La Turquie commémore les vingt-cinq ans du conflit kurde qui a fait environ 45 000 victimes. Ankara a entrepris des efforts d'ouverture envers la communauté kurde en élargissant ses droits. Il est envisagé de renommer les villages kurdes dont les noms avaient été turquifiés, ainsi que de développer la langue kurde dans les établisssements scolaires.
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Updated on 20.01.2016