L’Iran redevient la plus grande prison du monde pour les journalistes

Avec 42 journalistes et cyberdissidents emprisonnés, la République islamique d’Iran occupe désormais le rang de première prison du monde pour les professionnels de l’information. La condamnation du journaliste Ahmad Zeydabadi à six ans de prison ferme, le 1er janvier, a été confirmée en appel. Le 4 janvier, Bahaman Ahamadi Amoee a été condamnéà sept ans et quatre mois de prison ainsi qu’à 34 coups de fouet par la 26e chambre du tribunal de la révolution de Téhéran. Le 4 janvier, trente-six députés supporters du président Mahmoud Ahmadinejad ont déposé un projet de loi visant à considérer les opposants arrêtés comme des "mohareb" (ennemis de Dieu) et à ce qu’ils soient exécutés “dans un délai maximal de cinq jours“. Par ailleurs, ce projet de loi vise à réduire à cinq jours le délai accordé à l’appel en cas de condamnations en première instance pour des délits relatifs au “trouble à l’ordre public“ et de “moharebeh“(guerre contre Dieu), contre les vingt-cinq actuellement prévus par l’article 236 du code pénal. « Nous sommes très inquiets face aux demandes réitérées des plus hauts dignitaires de la République islamique d’Iran d’appliquer le ‘châtiment suprême’ à l’encontre des prisonniers, notamment les journalistes. Le danger est imminent : les plus extrémistes du régime sont capables de faire exécuter tous les témoins de la répression. Les instances internationales doivent agir de toute urgence avant qu’un drame n’arrive, et que les prisonniers politiques qui croupissent déjà dans les prisons ne soient exécutés », a déclaré Reporters sans frontières. Dans un point de presse organisé le 4 janvier, le ministère des Renseignements a déclaré que : “Plusieurs agents venus des pays étrangers ont été arrêtés avec leur caméras et appareils photo.” Par ailleurs, le ministère a publié la liste de soixante ONG et médias considérés comme ayant incité et participé aux émeutes. Sur cette liste, figurent la chaîne britannique BBC (notamment son service en persan) et la chaîne américaine Voice of America, ainsi que des organisations de défense des droits de l’homme, telles que Human Rights Watch. Tout contact ou collaboration de citoyens iraniens avec une organisation ou un média figurant sur cette liste est strictement interdit. Arrêté le 14 juin 2009, Ahmad Zeydabadi fait toujours l’objet d’importantes pressions de la part des interrogateurs du ministère des Renseignements, afin de demander publiquement pardon au Guide suprême l’ayatollah Ali Khamenei pour ses articles considérés comme dérangeants. Emprisonné déjà en 2000 et 2003, il est détenu dans une cellule à l’isolement de la section 209 de la prison d’Evin. Lauréat du Prix de la plume d'or de la liberté 2009, il a été condamné, le 23 novembre, à cinq ans de prison et à l’exil dans la ville de Gonabad, dans le nord-est du pays. Selon Mahdieh Mohammadi - son épouse -, cette condamnation vient d’être confirmée en appel. Bahaman Ahamadi Amoee a été condamné, selon son avocate Me Farideh Gheyrat, à sept ans et quatre mois de prison ainsi qu’à 34 coups de fouet, par la 26e chambre d’un tribunal de Téhéran. Collaborateur de plusieurs publications proches du courant réformateur, il a été arrêté à son domicile, le 20 juin dernier, avec son épouse, Jila Baniyaghoob. Cette dernière a été libérée le 19 août, contre le versement d’une caution de 100 millions de toman (soit 90 000 euros). Depuis les manifestations de l’opposition du 27 décembre, une rafle orchestrée par le ministère des Renseignements et les Gardiens de la Révolution s’est abattue sur les milieux d’opposition et des médias. Une vingtaine d’Iraniens ont été arrêtés, dont une douzaine de journalistes et cyberdissidents. Les familles des journalistes emprisonnés font toujours la queue à la porte de la prison d’Evin, pour y trouver le nom d’un parent, d’un proche dont ils n’ont plus de nouvelles.
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Updated on 20.01.2016