L’acharnement continue à l’approche de l’élection présidentielle

Reporters sans frontières réitère son inquiétude face à la pression croissante exercée sur les médias bélarusses à l’approche de l’élection présidentielle, prévue le 19 décembre 2010. En raison des nombreuses interférences des autorités dans le travail des journalistes, la liberté de la presse semble plus que compromise au Bélarus, où l’atmosphère dans le milieu des médias a récemment été ternie par la mort tragique et toujours non élucidée du journaliste Oleg Bebenine. Le 13 septembre 2010, le journal d’opposition Narodnaïa Volia a reçu un nouvel avertissement du ministère de l’Information pour avoir prétendument « diffusé de fausses informations » sur le Comité de contrôle de l’Etat (SCC). En dix mois, le journal a déjà reçu quatre avertissements officiels et risque une suspension de trois mois, voire une fermeture, si les autorités intentent une action en justice. Reporters sans frontières redoute qu’au cours de la période électorale, l’article 51 de la loi sur les médias, qui autorise la suspension d’un journal après deux avertissements, ne soit utilisé par les autorités afin de fermer les journaux critiques ou de les inciter à l’autocensure. Cette épée de Damoclès pèse actuellement sur plusieurs titres indépendants, des avertissements ayant été lancés pour diverses sortes d’ « infractions », même les plus mineures. Ce sont deux articles, publiés fin août et relatant des affaires de corruption et de blanchiment d’argent au sein du SCC, qui ont valu cet avertissement à Narodnaïa Volia. Le ministère de l’Information a donné dix jours au journal pour publier une rétractation. « La divulgation de fausses informations sur le Comité de contrôle de l’Etat discrédite cette institution, peut affecter son activité et avoir d’autres conséquences négatives », a-t-il déclaré. La rédactrice en chef adjointe de Narodnaïa Volia, Svetlana Kalinkina, a expliqué à Reporters sans frontières qu’elle était étonnée de ne pas avoir été contactée par le ministère de l’Information pour s’expliquer avant que l’avertissement soit formulé, comme le voulait l’usage jusqu’à maintenant. Elle a exprimé ses craintes de voir fermer Narodnaïa Volia et d’autres périodiques critiques avant l’élection présidentielle. Dans un communiqué du 17 août 2010, Reporters sans frontières avait déjà fait part de son inquiétude au regard des cascades d’avertissements reçus par les deux grands journaux d’opposition Narodnaïa Volia et Nasha Niva ainsi que des dérives découlant de la nouvelle loi sur les médias. D’autres procédés, tels qu’empêcher un journal d’avoir accès au marché publicitaire, ont également cours au Belarus. C’est notamment le cas du Babruiski Kurier, au bord de la faillite, en raison de l’interdiction officieuse, mais efficace, imposée par les autorités aux annonceurs d’avoir recours aux pages de cette publciation. Depuis le mois de juillet, ce journal régional indépendant, un des plus anciens du pays (il date de 1914), n’a plus les moyens d’être publié, privé de ses ressources publicitaires. Régulièrement harcelé par les autorités locales, le titre se voit constamment refuser son accréditation pour couvrir des événements tels que le conseil municipal et autres rencontres officielles. Entre pression économique et accès limité à l’information, le Babruiski Kurier ne peut plus faire face à la compétition des autres périodiques, qui eux, évitent d’évoquer des questions sensibles. Suite à des demandes du bureau de l’Idéologie, le parquet a adressé, à plusieurs reprises, des avertissements au Babruiski Kurier, sous des prétextes fallacieux, donnant ainsi aux autorités le pouvoir de le suspendre ou de le fermer. Ce qui pourrait ne pas s’avérer nécessaire si le journal n’est pas en mesure de retrouver des annonceurs.
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Updated on 20.01.2016