L’éditeur de Radio Shabelle libéré
Organisation :
Reporters sans frontières (RSF) est soulagée d’apprendre la libération sous caution de Mohamed Bashir Hashi, l’éditeur de Radio Shabelle, lundi 23 mars 2015. RSF demande l’abandon de toutes les charges qui pèsent contre lui. Le journaliste est toujours poursuivi pour « tentative d’assassinat » sur un ancien membre du Parlement, alors que ce dernier a témoigné hier en faveur du journaliste et que l’accusation n’a pas produit de témoin à charge.
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Reporters sans frontières (RSF) a appris avec consternation le verdict de la justice somalienne qui justifie a posteriori la longue détention arbitraire de journalistes et les condamne à de lourdes amendes. Si quatre d’entre eux ont été libérés, un est toujours en prison.
La cour régionale de Banadir à Mogadiscio a finalement statué le 1er mars sur le sort des journalistes Mohamud Mohamed Dahir, directeur de la radio SkyFM et Ahmed Abdi Hassan, rédacteur en chef de Radio Shabelle, détenus arbitrairement depuis le 15 août 2014. Ils ont été reconnus coupables de « publication ou circulation d’informations fausses, exagérées ou trompeuses susceptibles de troubler l’ordre public » et condamnés à des peines de prison équivalentes à leur temps de détention effectué et à des amendes respectivement de 2000 $ et 500 $. Ahmed Abdi Hassan était en liberté conditionnelle depuis octobre 2014, son état de santé s’étant fortement détérioré au cours de sa détention.
Au cours de la même audience, le journaliste de radio Risaala Mohamed Abdi Ali, détenu depuis le 3 janvier 2015 a également été reconnu coupable de publication de fausses informations et sommé de payer une amende de 500 $.
Le propriétaire de Shabelle Media Network, qui possède Sky FM et Radio Shabelle, Abdimaalik Yusuf Mohamud, également en liberté provisoire depuis le 21 octobre dernier, a quant à lui été reconnu non coupable des charges d’« incitation au crime » et d’« incitation à désobéir à la loi » qui pesaient contre lui. Malgrè ce verdict, le groupe de médias a toutefois été condamné à payer une amende de 10 000 $.
En revanche, la cour n’a pas statué sur le sort de l’éditeur de Radio Shabelle, Mohamed Bashir Hashi, arrêté le 6 septembre 2014, accusé d’« attaque à l’intégrité, l’indépendance ou l’unité de l’Etat somalien », « haute trahison », « insurrection armée contre l’Etat » et « tentative d’assassinat » d’un ancien membre du Parlement dont la voiture avait explosé. Il risque la peine de mort.
« Reporters sans frontières est scandalisée par la sévérité et les incohérences de ce verdict, déclare Cléa Kahn-Sriber, responsable du bureau Afrique de l’organisation. Ce procès est une mascarade. Les peines de prison ne viennent que justifier à posteriori la longue détention des journalistes. Le montant des amendes, ainsi que les charges aberrantes contre Mohamed Bashir Hashi montrent bien que ce verdict répond à une logique de persécution et d’étouffement des médias indépendants en Somalie et notamment du Shabelle Media Network. Nous demandons à la justice somalienne de revoir ce verdict inique et de s’assurer que Mohamed Bashir Hashi, pour qui la procédure n’est pas terminée, ait accès à un procès équitable ».
Mohamed Bashir Hashi avait déjà été condamné à six mois de prison (ou une amende) en décembre 2013 pour avoir simplement interviewé une collègue journaliste qui affirmait avoir été violée. La journaliste avait été condamnée à six mois avec sursis pour diffamation sans que ses agresseurs allégués n’aient été entendus par la justice. Le directeur de Radio Shabelle, Abdimaalik Yusuf Mohamud avait aussi été condamné à douze mois de prison pour avoir soi disant offensé les institutions somaliennes et diffamé des officiels.
Radio Shabelle continue donc de s’attirer les foudres du pouvoir. En août 2014, l’Agence nationale de sécurité (ANS) de Somalie avait effectué un raid sur les nouveaux locaux où Sky FM et Radio Shabelle avaient trouvé refuge depuis la violente expulsion de leurs bureaux par le ministère de l’Intérieur en octobre 2013. Au cours de cette attaque, 19 employés de ces médias avaient été arrêtés et tous leurs équipements confisqués. Ils avaient été relâchés deux jours plus tard à l’exception d’Abdimaalik Yusuf Mohamud, Ahmed Abdi Hassan et Mohamud Mohamed Dahir. Selon leur témoignage, les journalistes auraient été soumis à des actes de tortures afin d’obtenir des aveux forcés sur leur intention de nuire au gouvernement somalien.
Radio Shabelle et SkyFM demeurent fermées à ce jour.
La Somalie occupe la 172e place sur 180 pays dans le Classement 2015 de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières.
(Photo: Les quatre journalistes: Mohamud Mohamed Dahir, Mohamed Bashir Hashi, Ahmed Abdi Hassan, et Abdimalik Yusuf Mohamed. (Radio Kulmiye) )
Publié le
Updated on
20.01.2016