Israël : polémique après un plan de licenciements chez Channel 13
La chaîne israélienne Channel 13 a annoncé un plan de licenciements qui vise plusieurs journalistes critiques du premier ministre Benyamin Netanyahou. Compte tenu des nombreuses tentatives de l’exécutif d’influencer la ligne éditoriale de la chaîne, RSF s’inquiète d’une mesure défavorable au journalisme d’investigation et au pluralisme.
Une quarantaine d’employés ont été licenciés de la chaîne israélienne Channel 13. Parmi eux, plusieurs journalistes critiques du Premier ministre Benyamin Netanyahou comme Barak Ravid et Nir Becher.
Les membres de la direction assurent que ce plan a été décidé pour des raisons économiques. Depuis plusieurs mois, la volonté est d’amener la chaîne d’informations vers davantage de divertissement et la crise du coronavirus a accentué les difficultés financières, expliquent-ils. Néanmoins, nombreux sont les commentateurs qui y voient une décision motivée politiquement : “La dernière purge de journalistes est-elle une tentative d’apaiser Netanyahou ?”, s’interroge par exemple le quotidien Haaretz dans un article.
Plusieurs des journalistes de Channel 13 ont en effet été à l’origine de révélations de scandales concernant le Premier ministre. Au point qu’en juin, celui-ci a appelé à emprisonner le journaliste Raviv Drucker, qui avait diffusé des enregistrements montrant comment une firme de télécom et son épouse, Sarah Netanyahou, avaient fait pression sur la chaîne pour une couverture plus favorable à sa politique.
La chaîne a également été rachetée en 2015 par l’oligarque Leonard Blavatnik, proche de Benyamin Netanyahou. Selon une fuite publiée par le quotidien Haaretz en juin, le milliardaire avait expliqué à la police que le chef du gouvernement s’était, à l’époque, rapproché de lui pour le convaincre d’acquérir la chaîne afin de créer un “Fox News israélien” : “Il se plaignait toujours des médias, des gauchistes (...) et du fait que Channel 10 (ancien nom de Channel 13 avant son rachat, ndlr) en particulier est anti-Israël”, a-t-il déclaré.
“Les nombreuses tentatives de l’exécutif d’influer sur la ligne éditoriale de Channel 13 font légitimement craindre des licenciements motivés politiquement, s’inquiète la responsable du bureau Moyen-Orient de RSF, Sabrina Bennoui. Or c’est précisément la présence de journalistes critiques du pouvoir qui rend la chaîne d’autant plus crédible et importante pour le paysage médiatique israélien. Ces évictions sont regrettables pour le journalisme d’investigation en particulier et pour le pluralisme des médias en Israël en général.”
Fin août 2019, le journaliste de Channel 12 Guy Peleg, également à l’origine de révélations sur les affaires Netanyahou, a été pris pour cible par le Premier ministre et ses sympathisants, accusé de répandre des “fake news”. Sa chaîne a dû lui fournir un garde du corps.
Israël occupe la 88e place au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF.