Au dernier moment, les journalistes britanniques ont finalement obtenu des visas d'entrée au Zimbabwe alors que l'équipe de cricket d'Angleterre doit effectuer une tournée dans le pays. Cet épisode tragi-comique est le dernier incident parmi la cinquantaine recensée depuis janvier 2004. Parmi eux, certains, comme celui de l'équipe de cricket, atteignent des sommets dans l'art de la persécution.
Au dernier moment, les journalistes britanniques ont finalement obtenu des visas d'entrée au Zimbabwe alors que l'équipe de cricket d'Angleterre doit effectuer une tournée dans le pays à partir du 26 novembre, désamorçant une crise diplomatique entre Londres et Harare. Dans un premier temps, les autorités zimbabwéennes avaient refusé l'accès à leur pays pour les journalistes sportifs de la BBC, du Times, du Sunday Times, de News of the World, du Sun et du Daily Mirror, cette mesure arbitraire prenant la suite d'une longue liste de violations aberrantes de la liberté d'expression au pays du président Robert Mugabe.
« Le Zimbabwe prouve une fois de plus qu'il est entré dans une impasse, a déclaré Reporters sans frontières. Même s'il est revenu en arrière in extremis, le gouvernement de Harare démontre qu'il mérite d'être considéré comme l'un des oppresseurs les plus zélés du droit à l'information, en dépit de ses engagements internationaux. »
Des sommets dans l'art de la persécution
Cet épisode tragi-comique est le dernier incident parmi la cinquantaine recensée par Reporters sans frontières depuis janvier 2004. Parmi eux, certains, comme celui de l'équipe de cricket, atteignent des sommets dans l'art de la persécution.
Le 10 novembre, un chômeur de Harare a ainsi été arrêté et condamné à une peine de huit mois de prison ou 140 heures de travaux de nettoyage dans une école pour avoir tenu des propos « sapant l'autorité du Président ». Reason Tafirei avait en effet manqué de chance, puisqu'un jour où il avait affirmé, à bord d'un autobus, que « Mugabe est un dictateur qui règne par l'épée, tandis que Tony Blair est un libérateur », un cadre du parti Zanu-PF (au pouvoir) présent dans le véhicule avait ordonné au chauffeur de se rendre au poste de police le plus proche, où le citoyen insolent avait été appréhendé.
Le 15 octobre, en sortant de la salle d'audience où l'opposant Morgan Tsvangirai venait d'être acquitté du chef de « trahison », le photographe de l'agence Associated press Angus Shaw a été arrêté par une personne non identifiée et forcé d'embarquer dans un 4x4 Land Rover sans plaques d'immatriculation. Il avait été relâché un peu plus tard, sans aucune autre forme de procès ni autres explications.
Le 16 septembre, la Commission des médias et de l'information (MIC), entièrement aux ordres du pouvoir, a enjoint Chakaodza Bornwell, rédacteur en chef du quotidien The Standard, de lui remettre les négatifs de photographies de Robert Mugabe prises au Harare Agricultural Show, au mois d'août. Dans son édition du 29 août, le journal publiait en une un cliché du Président remontant son pantalon, sous-titré par la légende : « Smartening up » (« Se rendre plus attrayant »). Seul problème : les photographies étaient prises en format numérique. Pour autant, malgré cette explication imparable, la commission n'en a pas moins continué de menacer de poursuivre The Standard si son ordre n'était pas exécuté.
Le 10 janvier, le directeur de la publication de l'hebdomadaire Zimbabwe Independent Iden Wetherell, son rédacteur en chef Vincent Kahiya et les deux journalistes Dumisani Muleya et Itai Dzamara, ont été arrêtés et détenus plusieurs jours sur ordre du ministre de l'Information Jonathan Moyo après la publication d'un article sur la « réquisition » par le président Mugabe d'un avion d'Air Zimbabwe, lors de ses vacances en Asie. Plus tard, le ministre avait dû convenir que l'histoire rapportée par le journal était vraie. En désespoir de cause, Jonathan Moyo avait alors estimé qu'à défaut d'être « diffamante », la publication d'une histoire vraie concernant le président Mugabe était à tout le moins « blasphématoire ».
Enfin, toujours au mois de janvier, le président de la MIC, Tafataona Mahoso, a menacé l'hebdomadaire The Independent de poursuites judiciaires, après la publication d'un éditorial désignant simplement les Zimbabwéens comme « an unthinking lot » (« un peuple qui ne réfléchit pas »).