Le père Guy Theunis, missionnaire belge et ancien rédacteur en chef de la revue Dialogue, a été accusé d'incitation au divisionnisme par un tribunal populaire rwandais. "Cet homme a passé sa vie à combattre le racisme et la haine ! Nous sommes scandalisés par le comportement du gouvernement rwandais", a déclaré Reporters sans frontières.
Les autorités rwandaises ont annoncé, le 4 octobre 2005, avoir accepté de transférer le dossier du père Guy Theunis en Belgique. Cette décision fait suite à la demande de ce pays, dont est originaire Guy Theunis, d'instruire le dossier. Le ministère belge des Affaires étrangères a déclaré que les autorités des deux pays auront encore « des discussions approfondies sur les modalités techniques » d'application de l'accord. Guy Theunis sera alors rapatrié, dès qu'une information judiciaire aura été ouverte en Belgique. Le père Guy Theunis, ancien rédacteur en chef de la revue Dialogue, est accusé par les autorités rwandaises d'avoir été un planificateur et un incitateur du génocide rwandais de 1994. Il est actuellement détenu à la prison centrale de Kigali.
-------------------------------------------------------------------------- 11.09.2005 Le père Guy Theunis classé parmi les incitateurs et les planificateurs du génocide
Reporters sans frontières apprend avec consternation la décision prise ce jour par une gacaca (tribunal populaire) de Kigali de placer le père Guy Theunis, ancien rédacteur en chef de la revue Dialogue, en catégorie 1, soit parmi les "planificateurs, les organisateurs, les incitateurs, les superviseurs et les encadreurs du crime de génocide".
"Le père Theunis a toujours défendu des idées de tolérance et de respect d'autrui. Il a passé sa vie à combattre le racisme et la haine ethnique et, aujourd'hui, il se retrouve accusé d'incitation au divisionnisme ! Nous sommes scandalisés par le comportement du gouvernement rwandais, a déclaré Reporters sans frontières. Nous ne sommes pas dupes. Il y a très certainement un règlement de comptes politique derrière cette affaire. Les autorités rwandaises lui ont attribué un visa pour mieux le piéger ensuite. Nous sommes également étonnés de la rapidité inhabituelle de la procédure et de la nature des témoins à charge lors de l'audience, la plupart membres du parti au pouvoir. Dans la revue Dialogue qu'il anime, le père Theunis permettait à tous ceux qui prônaient la réconciliation de s'exprimer, y compris à des opposants du président Paul Kagame".
"Nous ne comprenons pas non plus pourquoi cette arrestation survient aujourd'hui. Le père Theunis s'est rendu à plusieurs reprises au Rwanda, depuis 1994, chaque fois avec un visa délivré par les autorités. Guy Theunis est accusé d'avoir incité à la haine en publiant des extraits du journal extrémiste Kangura. C'est aberrant. Il avait effectivement repris des passages de cette revue, mais c'était dans le but d'en dénoncer la haine et l'intolérance", a ajouté l'organisation.
"Le père Theunis était notre correspondant au Rwanda en 1992 et 1993. Nous ne l'oublions pas et n'aurons de cesse de clamer son innocence et de nous mobiliser pour obtenir sa libération au plus vite", a conclu Reporters sans frontières.
Le 10 septembre 2005, à l'issue d'une audience publique, une gacaca du district de Rugenge (Kigali) a placé le père Guy Theunis dans la catégorie 1 des individus accusés d'avoir une responsabilité dans le génocide de 1994. Il a aussitôt été renvoyé à la prison centrale de Kigali où il restera jusqu'à son procès devant un tribunal ordinaire rwandais. Il risque la peine de mort.
Il a été accusé d'incitation à la haine et au divisionnisme, notamment parce qu'il avait publié des extraits d'articles du journal extrémiste Kangura, dans la revue Dialogue qu'il dirigeait au moment du génocide.
La Société des missionnaires d'Afrique a catégoriquement rejeté ces accusations. Le 9 septembre, les autorités belges ont convoqué l'ambassadeur rwandais à Bruxelles pour exprimer leur préoccupation et demander des explications sur cette affaire.
Le père Theunis a été arrêté le 5 septembre à l'aéroport de Kigali alors qu'il devait prendre un avion pour la Belgique. Il s'était rendu dans l'est de la République démocratique du Congo voisine pour participer à des séminaires sur la paix et la réconciliation.
Agé de 60 ans, ce missionnaire belge, membre de la Société des missionnaires d'Afrique, est le premier étranger à comparaître devant les gacacas, ces tribunaux populaires mis en place pour juger les centaines de milliers d'individus toujours détenus et accusés d'être impliqués dans le génocide de 1994.