Enlèvements, libérations, assassinats: les journalistes au coeur de la guerre

Lire en arabe (بالعربية) “Trois morts en une semaine : tout comme le calvaire de la population civile, le bilan des exactions commises contre les professionnels des médias et les citoyens-journalistes syriens continue de s’alourdir à un rythme effrayant. Des faubourgs de Damas à la capitale libanaise, les journalistes ne sont nulle part épargnés. Si nous sommes soulagés de savoir libres six professionnels des médias enlevés au cours de la semaine, nous nourrissons les pires inquiétudes quant au sort de ceux dont on reste sans nouvelles. La généralisation de telles pratiques est inacceptable. Nous exhortons encore une fois l’ensemble des forces armées et des milices en présence à respecter le droit international et à ne pas prendre pour cible les médias”, a déclaré Reporters sans frontières. Le 16 août 2012, trois des quatre employés de la chaîne de télévision pro-régime Al-Ikhbariya, enlevés six jours plus tôt alors qu’ils couvraient des affrontements en banlieue de Damas (voir ci-dessous), ont été libérés à Al-Tal, au terme d’une opération militaire de l’armée syrienne. Yarah Saleh et ses collègues Abboud Tabarah et Housam Imad, dont le rapt avait été revendiqué par une katiba (faction) de l’Armée syrienne libre (ASL), ont depuis été reçus par plusieurs représentants du régime syrien. Le quatrième membre de l’équipe, l’assistant cameraman Hatem Abu Yehiah, a trouvé la mort le 10 août dans des circonstances troubles. La version de la chaîne Al-Ikhbariya, évoquant une exécution du cameraman par les rebelles après sa capture, est reprise depuis sa libération par Yarah Saleh, mais elle contraste avec les déclarations de l’équipe lorsqu’elle était au mains de l’ASL. Selon cette dernière, Hatem Abu Yehiah aurait été mortellement atteint par des tirs de mortier en provenance de l’armée régulière. Par ailleurs, trois employés syriens de la chaîne de télévision Al-Yassariya, enlevés la veille à Beyrouth (Liban), ont été relâchés le 16 août par leurs ravisseurs. Ahmed Haffar, Mohamed Khazaal et Annoud Al-Khatib avaient été kidnappés dans les locaux de la chaîne par plusieurs dizaines d’individus armés, se réclamant du clan libanais Al-Moqdad. Ce dernier avait également pris en otages et menacé d’exécution une vingtaine d’autres Syriens et un ressortissant turc, pour garantir la protection d’un membre du clan, Hassan Al-Moqdad, retenu prisonnier en Syrie par un groupe rebelle qui le tient pour un franc-tireur du Hezbollah. Le clan a finalement libéré quelques otages, dont les journalistes, en considérant qu’ils n’étaient pas liés à la rébellion syrienne. Reporters sans frontières est toujours sans nouvelles d’Ahmad Sattouf, correspondant à Homs de la chaîne de télévision iranienne en langue arabe Al-Alam et de la chaîne pro-régime Al-Ikhbariya. La famille du journaliste a annoncé le 14 août 2012 qu’il avait disparu “depuis plusieurs jours”. La chaîne iranienne fait référence à des témoins qui auraient vu Ahmad Sattouf se faire enlever par des rebelles de nuit, alors qu’il rentrait chez lui, dans le centre de Homs. Aucun groupe rebelle n’a pour l’heure revendiqué ce rapt. Les locaux d’Al-Alam, dans le quartier d’Ahram à Homs, auraient par ailleurs été mis à sac et une partie du matériel aurait été dérobée. Le 12 août 2012, Bara’a Yusuf Al-Bushi, citoyen-journaliste et figure locale de l’opposition syrienne, a perdu la vie lors du pilonnage d’Al-Tal par les forces du régime syrien. Il aurait été mortellement touché par des éclats d’obus alors qu’il couvrait les violents affrontements entre l’Armée syrienne libre et l’armée régulière. Collaborateur d’Al-Arabiya et d’autres chaînes internationales, l’activiste originaire de Hama était très impliqué dans la diffusion d’informations sur les manifestations et leur répression depuis sa désertion de l’armée syrienne, fin mai. Ali Abbas, chef du département des affaires intérieures de l’agence de presse officielle SANA, a été abattu à son domicile de Jdaidet Artouz (banlieue de Damas) par des individus non identifiés, le 11 août 2012. Le groupe islamiste Al-Nosra vient de revendiquer cet assassinat le 17 août. Il avait déjà revendiqué le meurtre du présentateur Mohammad Saeed, enlevé mi-juillet à son domicile de Damas. Crédit photo : Phil Moore afp.com
Publié le
Updated on 20.01.2016