Egypte : perquisition et arrestations à Mada Masr, l’un des seuls médias indépendants du pays

Ce week-end, les forces de sécurité égyptiennes ont perquisitionné les locaux du site en ligne Mada Masr et arrêté quatre de ses journalistes. Reporters sans frontières (RSF) dénonce le matraquage continu des autorités égyptiennes contre les journalistes indépendants.

Le secrétaire de rédaction du site Internet Mada Masr, Shady Zalat, a été arrêté par les forces de sécurité égyptiennes, le vendredi 22 novembre, avant d‘être remis en liberté trois jours plus tard. Un communiqué de la rédaction, dont le site Internet est déjà bloqué depuis juin 2017, indique que le journaliste a été interpellé chez lui, dans la nuit, sans mandat d’arrêt.

Cette arrestation est intervenue peu de temps après la publication d’un article qui portait sur le fils du président Abdel Fattah Al-Sissi, affecté à un poste diplomatique à Moscou. Citant des sources des renseignements égyptiens, l’article explique que cette décision a été motivée par des critiques en interne.

Le lendemain après-midi, un deuxième communiqué de Mada Masr alertait de la perquisition de ses locaux. Les agents de police ont saisi les pièces d’identité des 16 membres de la rédaction qui étaient présents. Ils ont ensuite saisi les téléphones et les ordinateurs portables et demandé les codes d’accès pour les fouiller. Trois journalistes ont ensuite été conduits au poste pendant plusieurs heures : la rédactrice en chef, Lina Attalah, la reporter Rana Mamdouh et le directeur de la rédaction Mohamed Hamama. Tous ont été libérés depuis.

Voir ses locaux perquisitionnés et son personnel interpellé, voilà visiblement le prix à payer pour une rédaction qui prend le risque en Egypte de traiter d’un sujet sensible, déplore Sabrina Bennoui, responsable du bureau Moyen-Orient à Reporters sans frontières (RSF). Déjà affaiblie par le blocage de son site Internet dans le pays, la rédaction de Mada Masr subit un nouveau coup dur, mais c’est aussi une nouvelle atteinte à la liberté d’être informés des Egyptiens. Les autorités doivent cesser le matraquage de la presse et de toutes les formes de journalisme indépendant.

D’autres journalistes de Mada Masr, Ian Louie et Emma Scolding, respectivement de nationalités américaine et britannique, ont également été interrogés séparément. Une équipe de France 24, composée d’Eric de Lavarene et Nadia Bletry, s’était par ailleurs rendue sur place pour interroger Lina Attalah sur l’arrestation de Shady Zalat. La perquisition avait déjà commencé. Ils ont ensuite été retenus par la police et ont finalement pu quitter les lieux grâce à l’intervention de l’ambassade de France, qui avait envoyé deux diplomates les chercher.

Depuis le 20 septembre, date du début d’un mouvement de protestations en Egypte, les autorités ont procédé à la vague d’arrestation la plus importante depuis 2014. Elle a touché au moins vingt journalistes, dont une partie a été libérée.

L’Egypte occupe la 163e place au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF.

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Mise à jour le 25.11.2019