Disparitions forcées et menaces de mort à l'encontre des journalistes basés à l’étranger, deux pratiques de plus en plus utilisées par les autorités de Téhéran

Alors que plusieurs journalistes et intellectuels iraniens en exil ont reçu des menaces de la part des différents services des renseignements depuis le 24 février 2011, Mir Hossein Mousavi, propriétaire du journal suspendu Kalameh Sabaz, et sa femme, l’intellectuelle et écrivain à succès Zahra Rahnavard, ainsi que Mehdi Karoubi, propriétaire du journal suspendu Etemad Melli, et sa femme ont été arrêtés. Ils sont détenus dans un lieu inconnu. Le 27 février dernier, Gholam-Hossein Mohseni Ejei, le procureur général de Téhéran, a déclaré, lors d’un point presse, que MM. Mir Hossein Mousavi et Mehdi Karoubi étaient « en résidence surveillée et (que) leurs contacts avec l’extérieur - téléphone, Internet – (étaient) coupés », sans pour autant préciser le lieu de leur détention et le motif de leur arrestation. Reporters sans frontières somme les autorités iraniennes de révéler le lieu de détention de MM. Mousavi et Karoubi et de leurs épouses. Selon l’article 32 de la Constitution iranienne*, le motif et le lieu de détention de tout individu doivent être déclarés officiellement par les autorités judiciaires « dans un délai maximum de vingt-quatre heures ». Selon certaines rumeurs, les deux hommes et leurs femmes seraient actuellement dans une prison militaire dans le centre de Téhéran. Les arrestations arbitraires et le maintien au secret des prisonniers politiques constituent une violation du droit international. De telles pratiques s’apparentent à des disparitions forcées. Les autorités de Téhéran n'hésitent pas à y recourir de manière généralisée et régulière. Reporters sans frontières demande au Conseil des droits de l’homme des Nations unies, lors de sa prochaine session, de nommer et de mandater un envoyé spécial du Secrétaire général de l’ONU pour enquêter sur la situation des droits fondamentaux en Iran. Par ailleurs, plusieurs journalistes et intellectuels exilés ont été menacés par des « inconnus » par SMS, par mail ou directement par téléphone : « Arrêtez vos actions contre la République islamique, le châtiment suprême vous attend » ; « On vous ordonne d’arrêter sinon vous allez le payer ». En un an, Reporters sans frontières a recensé de nombreux cas de menaces, de convocations, d'appels anonymes de la part d’agents du ministère des Renseignements. Des journalistes et intellectuels iraniens ont été placés sous protection policière dans plusieurs pays européens. Pour leur sécurité, ils ont préféré garder l’anonymat. L'organisation souligne que le régime s’en prend également à leurs familles restées en Iran. Au lendemain de la Révolution, en 1979, le régime de la République islamique avait exécuté plus de 200 opposants résidant à l’étranger. La majorité se trouvait en Europe. Les assassins ont pu échapper à la justice grâce à un subtile chantage de la part des autorités iraniennes. Ainsi, rares ont été les cas où la justice a été rendue dans les pays occidentaux, comme dans le cas du journaliste et écrivain exilé, Reza Mazlouman, assassiné le 27 mai 1996 à son domicile de Créteil, en France, pour avoir "insulté" l'islam et le Prophète. Son véritable assassin n’a jamais été arrêté alors qu’un Iranien, soupçonné d'avoir agi pour le compte des services secrets iraniens, Ahmad Jayhooni, a été inculpé de complicité dans l'assassinat.    *  Article 32 de la Constitution iranienne
Nul ne peut être arrêté sauf dans les cas et suivant les modalités déterminés par la loi. En cas d’arrestation, les chefs d’inculpation et les motifs doivent être immédiatement notifiés par écrit et expliqués à l’inculpé ; le dossier préliminaire doit être adressé aux autorités judiciaires compétentes, dans un délai maximum de vingt-quatre heures, les mesures préparatoires du procès devant être prises dans les plus brefs délais. Tout contrevenant à ce principe sera puni conformément à la loi.
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Updated on 20.01.2016