Disparition de Guy-André Kieffer : Les autorités bloquent l'enquête et empêchent l'audition de proches de la présidence cités par Michel Legré

Dans un courrier adressé, le 21 mai, au procureur de la République d'Abidjan, le juge d'instruction français Patrick Ramaël affirme que ses "demandes d'audition comme témoins de personnes citées par Monsieur Legré n'aboutissent pas". Le beau-frère de Mme Simone Gbagbo a cité au moins huit noms de personnes impliquées dans la disparition de Guy-André Kieffer.

Selon les informations recueillies par Reporters sans frontières, les autorités ivoiriennes bloquent l'enquête de la justice française dans la disparition du journaliste franco-canadien Guy-André Kieffer. Dans un courrier adressé, le 21 mai, au procureur de la République d'Abidjan, le juge d'instruction français Patrick Ramaël se plaint "du blocage total dans (ses) investigations". Le magistrat affirme que ses "demandes d'audition comme témoins de personnes citées par Monsieur Legré n'aboutissent pas". Dans son courrier, il "demande solennellement d'intervenir pour obtenir la comparution des personnes dont l'audition est indispensable à la manifestation de la vérité". Entendu à deux reprises par le juge français, Michel Legré, beau-frère de Mme Simone Gbagbo et dernière personne à avoir vu Guy-André Kieffer avant sa disparition, a cité au moins huit noms de personnes impliquées, selon lui, dans l'enlèvement du journaliste. Il s'agit de Sery Lia, un militaire qui aurait enlevé Guy-André Kieffer, Gouamene, un capitaine de l'armée, Aubert Zohore, le directeur de cabinet du ministre de l'Economie et des Finances, Victor Nembelissini, le directeur général de la Banque nationale d'investissement, Patrice Bailly, le responsable de la sécurité du chef de l'Etat, Anselme Seka Yapo, le responsable de la sécurité de Mme Gbagbo, Bertin Gahié Kadet, conseiller à la présidence chargé des affaires de Défense et Moïse Kore, qui se définit lui-même comme le pasteur de Gbagbo. Toujours selon Michel Legré, Guy-André Kieffer aurait été enlevé sur le parking d'un centre commercial d'Abidjan par plusieurs hommes et emmené, à bord d'un véhicule 4x4 vert, dans un camp militaire sous les ordres de Patrice Bailly. Reporters sans frontières a exprimé son indignation : "L'impunité reste malheureusement la règle en Côte d'Ivoire. Il est aujourd'hui indispensable que les autorités ivoiriennes renouvellent leur engagement d'apporter la coopération judiciaire et policière nécessaire à la poursuite de l'enquête et à la sécurité des témoins. Reporters sans frontières et ses avocats, Me Jean Martin et Guillaume Prigent, attendent une prise de position officielle et immédiate et souhaitent que les autorités fassent le nécessaire pour que les convocations demandées par le juge Ramaël soient exécutées. Enfin, Reporters sans frontières demande aux pouvoir publics français de convaincre les responsables ivoiriens de la nécessité d'apporter un plein concours à cette information judiciaire". Osange Silou-Kieffer, l'épouse du journaliste disparu a exprimé sa déception à la suite de son entretien, le 25 mai avec le juge Ramaël. "Les plus hautes autorités de l'Etat ivoirien, même le président Gbagbo, m'avaient promis qu'il n'y aurait pas d'obstruction à l'enquête et que toutes les personnes concernées par cette affaire pourraient être interrogées. Je demande des explications", a-t-elle déclaré. Par ailleurs, le juge Ramaël a expliqué que la voiture retrouvée à l'aéroport n'avait pas été conduite là par Guy-André Kieffer. Selon le magistrat, le siège a été avancé et c'est une personne plus petite qui a certainement conduit le véhicule sur le parking de l'aéroport. Guy-André Kieffer, journaliste indépendant franco-canadien basé à Abidjan, en Côte d'Ivoire, n'a plus donné de nouvelles depuis le vendredi 16 avril 2004. Il a été vu pour la dernière fois vers 13 heures dans un centre commercial de la capitale. Son téléphone portable est coupé et il n'a contacté personne. Agé de 54 ans, marié et père de deux enfants, le journaliste s'est spécialisé dans les matières premières ainsi que les affaires économiques et financières. Il a travaillé pour le quotidien économique français La Tribune de 1984 au début de l'année 2002. Installé à Abidjan depuis cette date, Guy-André Kieffer travaillait comme journaliste indépendant, et collaborait à La Lettre du Continent et plusieurs journaux ivoiriens. Le site du comité de soutien "Vérité pour Guy-André Kieffer
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Updated on 20.01.2016