Deux journalistes séquestrés et violemment agressés par des sympathisants des Frères musulmans

Reporters sans frontières condamne avec la plus grande fermeté la violente agression des journalistes Aya Hassan et Mohamed Momtaz, alors qu’ils couvraient, le 9 août 2013, une marche organisée par les partisans du président déchu Mohamed Morsi. D’après les informations recueillies par Reporters sans frontières auprès du Syndicat des journalistes, Mohamed Momtaz, qui travaille pour le journal Veto, était en train de couvrir la marche des sympathisants des Frères musulmans en direction de la place Al-Nahda au Caire lorsqu’il a été violemment pris à partie par les manifestants. Ces derniers lui ont confisqué sa caméra et ont commencé à le frapper, avant de l’emmener en voiture jusqu’à la place Al-Nahda, où se tenait le sit-in. Sous une des tentes installées sur place, Mohamed Momtaz a de nouveau été frappé et forcé à se déshabiller. Interrogé, il a été accusé d’espionnage. Relâché au bout de trois heures, il a dû être conduit à l’hopital. La journaliste de Youm 7, Aya Hassan, qui couvrait également la manifestation, a été témoin de l’agression de son collègue. Alors qu’elle photographiait la scène, les manifestants lui ont confisqué son matériel et l’ont brutalement molestée. Placée au milieu de manifestantes chargées de l’empêcher de sortir de la marche et de partir, Aya Hassan a, elle-aussi, été emmenée sous une tente sur la place Al-Nahda, où elle a été interrogée, fouillée, et frappée à de nombreuses reprises, alors qu’elle avait les yeux bandés. Elle a été sommée de reconnaître son appartenance politique et de fournir les noms de ceux qu’elle connaissait au ministère de l’Intérieur, dans l’armée ou dans l’opposition. Sa réponse “je suis seulement journaliste” ne lui a pas évité les mauvais traitements. Dans un témoignage vidéo posté sur Youtube et retranscrit par Youm 7, Aya Hassan donne les détails des mauvais traitements qui lui ont été infligés pendant plus de quatre heures. “Un des hommes m’a trainée au sol par les cheveux dans une tente adjacente (...), il m’a frappé au visage avec son pied jusqu’à ce que mon nez se mette à saigner. Il m’a alors donné un morceau de tissu couvert de sang, en me prévenant que j’allais subir le même sort que la personne qui avait été auparavant chatiée en ces lieux.” Selon le Syndicat des journalistes, l’homme faisait référence à Mohamed Moaz. “Ce qui est arrivé le 9 août dernier à ces deux professionnels de l’information est intolérable. Les autorités égyptiennes doivent mettre en oeuvre les moyens nécessaires afin que ces exactions ne restent pas impunies. Elles se doivent d’assurer la protection des acteurs de l’information,” a déclaré Reporters sans frontières. Ces deux agressions, particulièrement violentes, ne sont malheureusement pas des cas isolés. Les partisans de Mohamed Morsi ont, à plusieurs reprises, empêché des journalistes égyptiens de couvrir leurs manifestations, les prenant délibérément pour cible lorsqu’ils ne travaillaient pas pour des médias qui leur étaient proches idéologiquement. Ainsi, le 8 août, des partisans des Frères musulmans ont empêché Rufayda Yassin, correspondante de Sky News, de couvrir une manifestation, alors que celle-ci était en plein direct. Quelques jours auparavant, le photographe du journal Al-Masry Al-Youm, Mohamed Tarek, a été encerclé par les manifestants pro-Morsi lors d’un sit-in sur la place Raba’a Al-Adawiya au Caire. Ceux-ci lui ont pris son appareil photo et ont effacé toutes les données de sa carte mémoire. Ils l’ont ensuite expulsé du sit-in, et ont fini par lui rendre son appareil. Les autorités égyptiennes ont quant à elles pris des mesures répressives sévères à l’encontre des médias proches des Frères musulmans. Depuis le 3 juillet 2013, date de la chute du Président Morsi, Reporters sans frontières a recensé 52 cas de journalistes arrêtés par les nouvelles autorités.
Publié le
Updated on 20.01.2016