Des règlements de comptes politiques entraînent la fermeture d'une télévision privée à Beyrouth

Reporters sans frontières s'interroge sur les causes de la fermeture de la chaîne privée Murr Television (MTV), le principal média d'opposition, et s'indigne de la violence avec laquelle les gendarmes libanais ont exécuté mercredi 4 septembre la décision prise, le jour même, par le tribunal des Imprimés. " La fermeture de MTV a des airs de règlements de comptes politiques puisqu'elle intervient juste après l'élection de Gabriel Murr, son propriétaire, à la députation. D'autant que Gabriel Murr a été élu au détriment de la sœur du ministre de l'Intérieur, Elias Murr ", a déclaré Robert Ménard, secrétaire général de l'organisation. " Par ailleurs, la justice libanaise a décidé de mettre la chaîne de télévision sous scellés pour une durée indéterminée, se basant sur un article de loi qui n'avait encore jamais été appliqué ", a-t-il ajouté. Comme le prévoit l'article 68 de la loi électorale de 1996, la chambre des référés du tribunal des Imprimés a décidé, le 4 septembre, la fermeture de MTV ainsi que de Radio Mont-Liban, qui appartient également au groupe Murr. La chaîne de télévision et la radio sont condamnées pour propagande électorale illicite durant des élections législatives partielles, particulièrement houleuses, qui se sont déroulées en juin 2002 dans le Metn (nord de Beyrouth). La chaîne MTV est également sanctionnée pour avoir diffusé des propos "portant atteinte aux relations avec la Syrie et à la dignité du chef de l'Etat Emile Lahoub". Alors que plusieurs médias au Liban sont la propriété de grandes figures politiques, à commencer par le Premier ministre, Rafik Hariri, c'est la première fois que l'article 68 est appliqué. De plus, le parquet a pris la décision de poursuivre MTV et Radio Mont-Liban alors que la campagne électorale était déjà terminée. Ceci laisse supposer que des pressions politiques et une volonté de règlement de comptes avec l'opposition chrétienne antisyrienne sont à l'origine de cette action de justice. Plus inquiétant encore, la décision du tribunal des Imprimés ne spécifie pas la durée de fermeture des deux médias concernés. Du fait d'une autre poursuite judiciaire en cours contre Lebaneese Broadcasting Corporation (LBC), télévision privée également identifiée comme favorable à l'opposition chrétienne antisyrienne, certains parlent déjà d'une campagne de pressions politiques organisée par la justice et les forces de l'ordre. Reporters sans frontières s'indigne par ailleurs de la brutalité avec laquelle les gendarmes ont évacué le personnel des locaux de MTV, molestant des journalistes. Un photographe de l'Agence France-Presse, Anouar Amro, a dû être soigné pour une entorse au poignet.
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Updated on 20.01.2016