Des opposants arrêtés pour avoir demandé justice pour Bahaddin Khaziev
Un journaliste d'opposition a échappé à une tentative d'assassinat. Pris pour cible par des inconnus, le rédacteur en chef du journal d'opposition Bizim Yol, a eu les jambes écrasées par une voiture et se trouve aujourd'hui à l'hôpital dans un état grave. Reporters sans frontières appelle le gouvernement à prendre la mesure de la situation et à mettre un terme à la violence qui s'abat sur les journalistes.
« L'agression du rédacteur en chef du journal Bizim Yol, Bahaddin Khaziev, constitue la deuxième tentative d'assassinat contre un journaliste d'opposition en moins de trois mois. Ce sont les mêmes méthodes de harcèlement, d'une rare violence, qui sont utilisées : enlèvement par des inconnus, passage à tabac jusqu'à laisser sa victime pour morte, sans connaissance. Qui sont ces commandos ? S'agit-il de groupes mafieux isolés ? Pour le compte de qui exécutent-ils leurs crimes? Pourquoi les enquêtes menées par les autorités ne permettent-elles jamais d'identifier les auteurs de ces actes barbares ? Le gouvernement doit impérativement prendre la mesure de la situation, prouver qu'il est réellement décidé à faire la lumière sur ces affaires et à mettre un terme à la violence qui s'abat sur les journalistes», a déclaré Reporters sans frontières. Dans la nuit du 18 mai 2006, vers minuit, deux Jigoulis noires (marque russe de voiture) ont stoppé le véhicule de Bahaddin Khaziev, rédacteur en chef du quotidien Bizim Yol, en lui barrant la route. D'après les informations recueillies par Reporters sans frontières, cinq hommes habillés en tenue de sport ont forcé le journaliste à sortir de sa voiture. Ils lui ont mis un sac sur la tête et l'ont emmené avec eux. Il a ensuite été passé à tabac par ses ravisseurs, qui lui ont demandé de cesser d'écrire des articles critiques. Ces derniers l'ont abandonné au bord d'un lac, vers trois heures du matin. Avant de partir, ils lui ont roulé sur ses deux jambes. Bahaddin Khaziev a été retrouvé sans connaissance par des riverains au petit matin, à vingt kilomètres de Bakou. Ils ont appelé la police et les secours, qui l'ont transporté à l'hôpital pour le réanimer. Bahaddin Khaziev souffre de nombreuses fractures à la jambe gauche et contusions sur tout le corps. Ses mains portent les marques de liens. Les os de sa jambe ont été déplacés par la voiture qui lui a roulé dessus. Son état de santé a été jugé très grave par un médecin de l'hôpital. Interrogé sur l'identité de ses agresseurs, le journaliste a répondu qu'il ne les avait pas reconnus mais qu'il avait entendu une voix disant : « Nous avons fait ce que tu voulais et même plus .» Bahaddin Khaziev a ajouté qu'il supposait que des personnes visées par ses articles pouvaient être derrière son agression. Le dernier numéro de Bizim Yol, publié cinq fois par semaine, portait sur le trafic illégal de caviar noir et la corruption d'un haut responsable du ministère de la Sécurité nationale (ancien KGB, services secrets), Ali Nagiev. Le journaliste est persuadé que ses ravisseurs ont agi sur ordre du ministère. Une enquête a été ouverte par un département de police local dans l'affaire Bahaddin Khaziev. Le leader du Parti du front populaire azerbaïdjanais (PPFA), Ali Kerimli, a qualifié l'agression de Bahaddin Khaziev « d'acte de terreur au niveau de l'Etat », tenant les autorités pour responsables. Un peu plus d'un an après la mort d'Elmar Husseynov, abattu par des inconnus le 2 mars 2005, ses assassins n'ont toujours pas été retrouvés. Et l'enquête sur l'agression du journaliste du quotidien d'opposition Azadlig, Fikret Huseynli, qui avait échappé à la mort de justesse le 5 mars 2006, n'a rien révélé.