De nouvelles décisions décevantes, la Turquie sourde à toutes les critiques
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Le lundi 25 octobre, les avocats de la famille du journaliste d’origine arménienne Hrant Dink, assassiné le 19 janvier 2007, ont demandé à ce qu’une reconstitution des faits soit organisée, en présence du tireur Ogün Samast, sur les lieux de l’assassinat, dans le quartier de Sisli (Istanbul). Non seulement la 14e chambre de la cour d’assises d’Istanbul a rejeté cette demande, mais elle a également décidé que Ogün Samast, âgé de 17 ans au moment des faits, serait désormais jugé par un tribunal pour enfants. Son dossier a donc été transféré à la cour d’assises des mineurs d’Istanbul (à Sultanahmet, rive européenne de la ville). Le procès du tireur ne reprendra qu’en début d’année.
La requête de réunion des dossiers de Trabzon (bord de la Mer noire, Nord-Est), où sept gendarmes sont accusés de n’avoir pas réagi aux projets d’attentats contre le journaliste, et d’Istanbul, où le dossier principal est traité, a également été rejetée par le tribunal. Deux décisions très décevantes, surtout après l’arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l’homme du 14 septembre 2010.
Enfin, l’Institut de recherche scientifique Tübitak n’a toujours pas répondu à la demande formulée, le 10 mai dernier, par la famille Dink. Elle concerne l’analyse des enregistrements vidéo de la banque Akbank (à proximité immédiate du journal Agos, devant lequel H. Dink a été abattu) au moment de l’assassinat. Les parties civiles cherchent à comprendre comment les images ont pu en être effacé et s’il est possible de les restaurer.
Les retards, obstacles et contretemps continuent d’émailler un processus judiciaire qui ne semble pas être porté par une volonté réelle de faire la lumière et donne le sentiment de juger à minima et regret une affaire d’envergure nationale. On se serait pourtant attendu à ce que la Turquie tire les enseignements de sa récente condamnation par la Cour européenne des droits de l’homme. Ce sont ces agissements mêmes qui ont contribué à la dégringolade du pays à la 138e place du classement mondial de la liberté de la presse.
Durant la quinzième audience, le tribunal a également demandé à entendre dix autres personnes comme témoins, dont Ergün Cagatay. L’un des principaux accusés du dossier Dink, Yasin Hayal, aurait désigné dans le passé ce dernier témoin comme ayant projeté d'agresser le prix Nobel de littérature Orhan Pamuk.
Le parquet d’Istanbul, quant à lui, doit évaluer si la déposition d’Erhan Özen peut être versée au dossier. Cet ancien collaborateur des services de renseignement de la gendarmerie (Jitem) de 1997 à 2005 avait indiqué que les assassinats de Hrant Dink (19 janvier 2007), du prêtre Andrea Santoro (5 février 2006) et de trois missionnaires à Malatya (18 avril 2007) faisaient partie des actions envisagées par le Jitem à cette époque.
Le 14 septembre dernier, la CEDH avait condamné la Turquie à verser 133 595 euros de dommages intérêts (y compris les frais et dépens) pour avoir manqué de protéger la vie de Hrant Dink, directeur de la publication de l’hebdomadaire Agos. La CEDH avait conclu à l’unanimité à la violation de l’article 2 (droit à la vie), 10 (droit à la liberté d’expression) et 13 (droit à un recours effectif).
La prochaine audience a été fixée au 2 février 2011.
Publié le
Updated on
20.01.2016