Reporters sans frontières est préoccupée par les récentes décisions de justice rendues en défaveur de la presse et à la demande d'hommes politiques, à la veille du second tour des élections générales prévu le 29 octobre 2006. L'organisation constate l'inadéquation de la loi électorale avec le traitement médiatique d'une campagne électorale.
A la veille du second tour des élections générales, le 29 octobre 2006, Reporters sans frontières est préoccupée par de récentes décisions de justice défavorables à la couverture médiatique de la campagne. Le 19 octobre 2006, le Tribunal supérieur électoral (TSE - fédéral) a mis à l'amende et condamné à censurer son site la station de radio CBN pour “propagande électorale”. Le 25 octobre, le Tribunal régional électoral (TRE) de l'Etat de Paraná (Sud) a interdit à la presse de relater une opération policière, à la demande d'un candidat au poste de gouverneur.
“Ces décisions judiciaires traduisent une conception singulière du rôle de la presse, dont la vocation est bien entendu d'animer le débat politique mais aussi de prendre position. La loi électorale qui interdit toute propagande en période de campagne paraît bien peu en phase avec la couverture de la vie politique par les médias. Une ligne éditoriale coïncide souvent avec une préférence partisane, et la décision du TSE présume exagérément que tout lecteur ou auditeur y adhérerait. C'est attribuer à la presse plus de pouvoir qu'elle n'en a. Quant au jugement rendu par le TRE de l'Etat de Paraná saisi par le candidat Osmar Dias, il ne sert pas vraiment les intérêts électoraux de ce dernier. M. Dias croit-il se protéger en obtenant la censure préventive des médias ? Ce type de censure doit appartenir au passé“, a déclaré Reporters sans frontières.
Le 19 octobre 2006, le Tribunal supérieur électoral a condamné à 10 000 dollars d'amende la station de radio CBN, dont l'éditorialiste Arnaldo Jabor avait fait un commentaire jugé trop favorable au candidat d'opposition à la présidentielle Geraldo Alckmin. La haute juridiction, saisie par la coalition du président Luis Inácio Lula da Silva, candidat à sa propre réélection, a également ordonné à CBN de retirer le commentaire de son site Internet. Le TSE a estimé que la station avait enfreint la loi électorale, qui interdit toute propagande en période de campagne (la campagne officielle a débuté le 1er juillet 2006).
Le 25 octobre 2006, le Tribunal régional électoral de l'Etat de Paraná a accédé à la demande d'Osmar Dias, candidat au poste de gouverneur, en mettant à l'amende le site Hora H News pour avoir publié des informations relatives à la saisie par la police d'une malle de billets dans un hôtel de Curitiba (capitale de l'Etat), menée le 23 octobre. Selon le juge Renato Lopes de Paiva, cette information est de nature à “porter préjudice” au candidat Osmar Dias, donné perdant dans les sondages. Le juge a assorti sa condamnation d'une interdiction à tous les médias de livrer la moindre information sur l'opération policière. Le magistrat a invoqué le “secret de justice” dans sa décision, un argument contesté par les syndicats de journalistes pour qui le droit d'accès à l'information garanti par la Constitution fédérale a été violé.