Confirmation de six ans de prison pour Fahem Boukadous

Le journaliste Fahem Boukadous a eu confirmation de sa condamnation par contumace à six ans de prison dans le procès de Gafsa.

La cour d'appel de Gafsa (400 km au sud de Tunis) a rendu son jugement concernant les trente-huit Tunisiens jugés pour leur participation aux manifestations qui se sont déroulées en 2008, dans le bassin minier de la région. Parmi eux, Fahem Boukadous, journaliste de la chaîne satellitaire El Hiwar Ettounsi, qui, toujours en fuite, a eu confirmation de sa condamnation à une peine de six ans de prison ferme. "La forte médiatisation de ce procès et la présence de nombreux observateurs internationaux montrant un réel soutien aux accusés de Gafsa n'a que faiblement joué sur la sévérité de la cour de Gafsa. Fahem Boukadous est maintenant voué à vivre dans la clandestinité, avec les traumatismes et problèmes de santé que cela implique. Cette peine de prison repose sur une accusation révoltante : celle d'avoir rempli son travail de journaliste", a déclaré l'organisation. Le journaliste de 38 ans est accusé de "participation à une entente criminelle ayant l'intention de porter atteinte aux personnes et à leurs biens". Or il n'a fait que "transmettre des images du soulèvement populaire", a indiqué son avocat. "L'objectif de ce procès est d'interdire à un journaliste de rendre compte des événements de Gafsa", a-t-il continué. Lors de cette séance d'appel, les avocats ont fait état de nombreux vices de procédure, tels que des aveux extirpés sous la torture, plusieurs refus de convoquer des témoins, etc. --------- 17.12.2008 Fahem Boukadous condamné à six ans de prison par contumace pour avoir couvert un mouvement social Le 11 décembre 2008, la cour d'assises de Gafsa (350 km au sud de Tunis) a condamné par contumace le correspondant de la télévision privée Al-Hiwar Attounsi, Fahem Boukadous, à six ans de prison pour “constitution d'une association criminelle susceptible de porter atteinte aux personnes et à leurs biens”, suite à la couverture médiatique des manifestations populaires dans la région minière de Gafsa. ”Ce verdict sévère constitue un autre exemple de décision arbitraire à l'encontre de tous ceux qui dérangent le pouvoir. En Tunisie, la profession de journaliste est un métier à haut risque. La justice tunisienne au service de pouvoir est toujours prête à condamner toute personne susceptible de s'opposer au régime du président Zine el-Abidine Ben Ali. En l'occurencce, Fahem Boukadous a simplement exercé son métier.” a déclaré Reporters sans frontières. Contacté par Reporters sans frontières, l'avocat du journaliste, Me Abderraouf al-Ayadi, a déclaré que le but de la décision était de réprimer les activités de son client . ”Fahem Boukadouss n'a même pas participé au mouvant social, il n'a fait que transmettre des images des incidents du bassin minier de Gafsa à la chaîne de télévision.(...) Les procès-verbaux incriminent le correspondant pour la couverture médiatique des mouvements populaires, le droit tunisien ne condamne pas les transmissions télévisées, ni le métier de journaliste,” a-il déclaré. “Cette décision est destinée à semer la terreur parmi les journalistes tunisiens”, a poursuivi l'avocat. ------------------------------------------------------------ 13.11.2008 Le correspondant d'une télévision indépendante recherché par la police pour sa couverture des événements du Bassin minier de Gafsa Reporters sans frontières demande l'abandon des poursuites judiciaires engagées contre le journaliste Fahem Boukadous, entré dans la clandestinité le 5 juillet 2008. Le correspondant de la télévision privée Al-Hiwar Attounsi est poursuivi pour "appartenance à une association de malfaiteurs" et "diffusion d'informations de nature à troubler l'ordre public". Sa couverture, pour la chaine tunisienne, des manifestations populaires dans la région minière de Gafsa (350 km au sud de Tunis) en 2008, ainsi que sa collaboration avec des médias étrangers qu'il avait mis en contact avec des syndicalistes, lui valent d'être recherché par les forces de l'ordre. Me Radhia Nasraoui, présidente de l'Association de lutte contre la torture en Tunisie (ALTT), a rencontré, le 11 novembre 2008, une délégation de Reporters sans frontières à Tunis. "Il est reproché à Fahem Boukadous, dans l'acte d'accusation, d'avoir établi des contacts avec les manifestants pour ses reportages. Chaque fois que son nom est mentionné, c'est en lien avec ses activités professionnelles de journaliste", a indiqué l'avocate. "Les autorités tunisiennes ne peuvent continuer à rappeler leur attachement à la liberté de la presse à chaque grande commémoration nationale, alors qu'un journaliste est contraint de se cacher. La faible couverture médiatique d'un événement aussi important que le mouvement social de Gafsa illustre la faible marge de manœuvre des médias tunisiens, dès qu'il s'agit de traiter de l'actualité politique nationale", a déclaré Reporters sans frontières. "Fahem Boukadous s'est trouvé au bon moment et au bon endroit pour témoigner de ces troubles sociaux. L'acharnement des autorités l'a poussé à abandonner son travail pour éviter une arrestation certaine. Nous demandons l'abandon des charges retenues contre le journaliste pour qu'il puisse retrouver sa famille et reprendre sa mission d'information", a ajouté l'organisation. Fahem Boukadous, 38 ans, a rejoint les rangs des correspondants d'Al-Hiwar Attounsi en 2006. Il a été le premier journaliste de télévision en mesure de couvrir sur place les manifestations qui se sont déroulées dans la région, en proie à un taux de chômage plus élevé que la moyenne nationale. Le journaliste a filmé les marches de protestation, recueilli les témoignages de la population et rendu compte des arrestations arbitraires de dizaines d'individus, dont un grand nombre se trouvent toujours en détention, dans l'attente de leur procès. Les images filmées par Fahem Boukadous ont été reprises par d'importants médias panarabes et postées sur les sites de partages de vidéos, tels que YouTube et Dailymotion, tous deux censurés en Tunisie. Le journaliste risque jusqu'à dix ans de prison. Le bassin minier de Gafsa, région d'exploitation du phosphate, est le théâtre, depuis le 5 janvier 2008, d'importants mouvements de protestation et rassemblements ouvriers. Les autorités ont procédé à des dizaines d'arrestations dans la rue, ainsi qu'aux domiciles des manifestants et syndicalistes. Par ailleurs, la police contrôle toujours l'accès à cette région, empêchant la presse d'y accéder librement. Créée en 2002, Al-Hiwar Attounsi est une voix originale dans le paysage médiatique tunisien. Mettant en pratique son slogan "La parole libre est l'essence d'un Etat libre", Al-Hiwar Attounsi a pour ambition de "montrer des visages méconnus". La chaîne, qui dispose de moyens limités, diffuse ses programmes une heure par jour sur le satellite Hotbird, avec le concours d'une télévision italienne. La fréquence de la chaîne et les horaires de diffusion sont publiés chaque semaine dans les journaux de la presse d'opposition. Une délégation de Reporters sans frontières s'est rendue dans la capitale tunisienne du 10 au 12 novembre 2008. Un rapport de mission, faisant état des pressions subies par la presse d'opposition et les journalistes indépendants, sera prochainement publié sur le site de l'organisation (www.rsf.org).
Publié le
Updated on 20.01.2016