Conditions de détention inhumaines des journalistes et tentatives d’étouffer l’affaire Sattar Beheshti

Reporters sans frontières exprime une fois de plus sa vive inquiétude face aux conditions de détention de plusieurs professionnels des médias iraniens. Le 31 juillet 2013, Mehdi Karoubi, propriétaire du journal suspendu Etemad Melli et ancien président du Parlement, a été transféré vers un lieu de détention secret, après une opération d'angioplastie à l'hôpital de Téhéran. Ce théologien dissident, âgé de 76 ans, a été hospitalisé trois fois depuis la semaine dernière, suite à plusieurs malaises et notamment à un malaise cardiaque. Mehdi Karoubi, mais aussi Mir Hossein Mousavi, propriétaire du journal suspendu Kalameh Sabaz, et sa femme, l'écrivain Zahra Rahnavard, sont en résidence surveillée depuis février 2011. Si Mir Hossein Mousavi et son épouse sont détenus à leur domicile, sur ordre du ministère des Renseignements, Mehdi Karoubi, est lui détenu dans un lieu inconnu. “C'est encore pire qu’une prison. Au moins les prisonniers, même maintenus à l'isolement, ont le droit de sortir dans la cour une fois par jour, mais lui a seulement le droit de se promener dans le parking du bâtiment”, a déclaré à RSF l'un des proches de Mehdi Karoubi. “Les détentions arbitraires de Mehdi Karoubi, Mir Hossein Mousavi et de son épouse Zahra Rahnavard n’ont aucune base légale au regard du droit national et des normes internationales. Ces emprisonnements constituent une violation flagrante de la Déclaration universelle des droits de l'homme alors qu'ils sont privés du droit à un procès équitable. Nous sommes en outre inquiets pour leur état de santé. La République islamique doit mettre un terme à cette situation”, a déclaré Reporters sans frontières. L’organisation, condamne également fermement les graves violations des droits des prisonniers d’opinions par la République islamique d’Iran, clairement engagée dans une chasse aux journalistes qui pourraient apporter des éléments sur la mort en détention du blogueur Sattar Beheshti. Depuis le 18 juillet 2013, le transfert d’Ali Nazeri, détenu juqu’ici à Evin, à la prison de la ville de Zâbol au Nord-Est du pays a suscité un mouvement de protestation des autres prisonniers du dortoir 350. La tension qui règne au sein des prisons entre les prisonniers politiques, et notamment plusieurs journalistes et net-citoyens emprisonnés dans ce dortoir, et les responsables pénitenciers ne cesse de monter. Ces derniers ont même déployé des gardes anti-émeutes pour étouffer la protestation. Abolfazl Abedini Nasr, journaliste emprisonné depuis le 2 mars 2010 et condamné à onze ans de prison ferme pour ses activités journalistiques en avril 2011 a lui aussi été transféré, le 27 juillet 2013, à la prison de Karon dans la ville d’Ahvaz (Sud du pays), l’une des pires prisons du pays, sans aucune explication ou motif juridique. Abolfazl Abedini Nasr est l’un des prisonniers à avoir vu le blogueur Sattar Beheshti, décédé en prison, pendant les douze heures que ce dernier a passé en détention, le 31 octobre 2011, dans le dortoir 350 de la prison d’Evin. C'est la deuxième fois en moins d'un an que ce journaliste est transféré. En novembre 2012, le lendemain de son transfert vers la prison de Karon, il avait été reconduit à la prison d’Evin sur ordre du procureur de Téhéran. Le journaliste a entamé une grève de la faim pour protester contre ces mesures punitives. L’acharnement des autorités contre le net-citoyen emprisonné Hossein Ronaghi Malki se poursuit. Arrêté le 13 décembre 2010, il purge une peine de dix-sept ans de prison malgré plusieurs opérations des reins et un état de santé très alarmant. Bénéficiant d’une permission pour suivre un traitement médical, il avait dû ensuite retourner à la prison d’Evin, le 22 mai 2013. Dans une lettre ouverte aux responsables judiciaires, son père, accusé par les autorités de négligence envers son fils, explique qu’”il est malade et il doit bénéficier de soins adéquats”. L'une des raisons de cette obstination contre ce défenseur des droits de l’homme, pourrait être liée aux récentes déclarations de la mère de Sattar Beheshti. Elle a révélé que Hossein Ronaghi Malki, l'un des prisonniers à avoir aussi vu Sattar dans le dortoir 350 de la prison d’Evin, pourra témoigner devant le tribunal et confirmera que Sattar Beheshti avait été victime de mauvais traitements et de torture lors de son interrogatoire par la police. Elle a également déclaré que l'avocat de la famille, Me Ghiti Pourfazel, avait été convoquée par les agents du ministère des renseignement pour la faire taire. Désormais, cette dernière n'a pas droit d’accorder d’interviews aux médias.
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Updated on 20.01.2016