Condamnation révoltante du célèbre hebdomadaire The New Times
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Reporters sans frontières déplore le verdict rendu par la cour de Moscou le 25 novembre 2010 condamnant The New Times pour « diffamation ».
Par ce verdict, elle invalide la solidité et la véracité de l’enquête « Esclaves des OMON » publiée par le journal en février 2010. The New Times doit réfuter une partie des faits exposés dans cette enquête, le titre et les deux auteurs de l'article doivent eux verser une amende de 4330 roubles (plus de 100 euros) pour dommage moral.
Reporters sans frontières réitère son soutien au New Times, hebdomadaire indépendant reconnu pour ses sérieuses investigations journalistiques sur des sujets sensibles d’intérêt général. En août 2010, le rédacteur en chef adjoint du journal, Ilya Barabanov a d’ailleurs reçu le prix Peter Mackler récompensant le courage et l’éthique dans la profession de journaliste, pour son enquête sur les « Esclaves des OMON ».
Ilya Barabanov y dénonçait les abus d’autorité au sein de l’OMON (unité anti-émeutes de la police, rattachée au ministère de l’Intérieur). Il y décrivait comment les agents de l’OMON étaient encouragés à réprimer violemment les manifestations, à exploiter les migrants dans l’illégalité et monnayer leur protection auprès des prostituées. Cette enquête avait été réalisée à partir d’une série d’entretiens effectués avec d’anciens agents.
Sa publication avait été suivie d’une plainte de la Direction générale des affaires intérieures (GUVD) de Moscou contre The New Times, arguant que l’article d’Ilya Barabanov portait atteinte à sa dignité et à sa réputation, et était fondé sur des sources non vérifiées. Le 2 septembre 2010, après avoir obtenu l’autorisation du tribunal de Moscou, le responsable de la Direction générale des affaires intérieures (GUVD) avait opéré une perquisition des locaux de la rédaction du journal, afin d’identifier ses sources (http://fr.rsf.org/russie-la-police-perquisitionne-the-new-03-09-2010,38280.html).
Enfin, des pressions ont été exercées sur des agents afin d’obtenir de faux témoignages pour le procès. La plupart des agents interviewés sont revenus sur leurs propos peu après la publication de l’article, affirmant qu’ils avaient été falsifiés. Au cours de l’audience du 19 novembre, Sergueï Taran, ancien agent de l’OMON, a déclaré qu’il ne se souvenait pas des sujets abordés avec le journaliste. Ilya Barabanov a expliqué à Reporters sans frontières les raisons de ce revirement : la GUVD a menacé et soudoyé l’ancien agent. Celui-ci a notamment été réembauché par un service de la GUVD, peu avant l’audience. The New Times avait dénoncé ces pressions dans un nouveau rapport publié sous le titre « Comment briser les soldats de l’OMON ».
Ces réactions confirment les graves dysfonctionnements et dérives de cette institution que dénonce l’enquête d’Ilya Barabanov.
En condamnant The New Times, la cour de Moscou décourage le journalisme d’investigation de qualité dont l’objectif est d’analyser et d’informer sur de graves problèmes de société comme les dérives des services la police russe.
Reporters sans frontières dénonce ce verdict révoltant, issu de faux témoignages, et appelle à l’acquittement du New Times.
Publié le
Updated on
20.01.2016