Le 30 mars 2015, une douzaine de policiers ont perquisitionné la rédaction du portail d’information The Malaysian Insider, à Kuala Lumpur, avant d’arrêter trois de ses journalistes. Le lendemain, le directeur et l’éditeur de l’hebdomadaire The Edge ont également été interpellés. Alors que la police demande leur maintien en détention provisoire, RSF dénonce ces arrestations qui visent à contraindre les journalistes à l’autocensure et à les empêcher d’exercer librement leur profession.
Le rédacteur en chef du
Malaysian Insider (
TMI),
Lionel Morais, le responsable des informations en Bahasa,
Amin Shah Iskandar et le responsable “reportages et analyses”,
Zulkifli Sulong ont été arrêtés en vertu de la loi sur la sédition (Sedition Act) de 1948 et de la loi sur les communications et le multimédia de 1998 (Communications and Multimedia Act 1998).
Ho Kay Tat, éditeur de l’hebdomadaire économique
The Edge, appartenant au même groupe de presse, et le directeur du
TMI Jahabar Sadiq ont été convoqués par la police le lendemain matin. Tous deux ont été placés en état d’arrestation en vertu des mêmes lois. La police a demandé au parquet de maintenir Ho Kay Tat et Jahabar Sadiq en détention provisoire. D’après la police, les cinq professionnels des médias ont été entendu safin qu’ils s’expliquent sur la publication d’articles “inexacts et entraînant une confusion” pour les lecteurs.
Le 25 mars dernier,
TMI avait publié un article affirmant que la “Conférence des chefs d'Etat” (chefs et gouverneurs des Etats malaisiens), avait rejeté une proposition d’amendement de la loi fédérale qui prévoit l’instauration des hudud (ordonnances prévoyant des peines fondées sur la loi islamique) dans l’Etat du Kelantan (nord-est). Mais selon les déclarations de Jahabar Sadiq relayées par la presse locale, ces arrestations pourraient avoir été motivées par d’autres articles que celui sur les hudud.
The Malaysian Insider et
The Edge avaient notamment publié une série d’articles sur le fond d’investissement stratégique du gouvernement et la capacité de se dernier à s’acquitter de ses dettes.
“Ces arrestations collectives résonnent comme un avertissement adressé à l’ensemble de la presse et équivalent à une mise en garde de tous ceux qui s'intéresseraient d’un peu trop près aux activités du gouvernement et des dirigeants du pays, déclare Benjamin Ismaïl, responsable du bureau Asie-Pacifique de Reporters sans frontières.
Nous exigeons la remise en liberté immédiate et inconditionnelle de Jahabar Sadiq et Ho Kay Tat. Les autorités doivent cesser de s’abriter derrière leur ‘respect de la loi malaisienne’ quand celle-ci permet un usage abusif de la force. Les officiels et les leaders de la coalition au pouvoir n’ignorent pas l’éventail de réponses, plus mesurées, qui s’offrent à eux quand ils jugent un article “inexact”. Leur volonté de voir des journalistes punis par la loi aussi souvent que possible témoigne d’une incompréhension totale des libertés fondamentales que sont la liberté de la presse et de l’information”.
La Malaisie dispose de nombreuses lois punissant pénalement les délits de presse. RSF demande régulièrement l'abrogation de ces lois. Ne tolérant pas la critique, le pouvoir politique invoque régulièrement le
Sedition Act afin de poursuivre des journalistes. C’est le cas du caricaturiste
Zunar et de ses collaborateurs, qui font actuellement l’objet de
procédures judiciaires.
La Malaisie qui figure au 147e rang sur 180 pays dans le
Classement mondial de la liberté de la presse 2015 établi par Reporters sans frontières, a vu sa situation se dégrader en 2014.