Les autorités ont reproché aux responsables de cinq hebdomadaires privés de Katmandou d'avoir fait paraître des pages blanches pour protester contre la censure. La semaine précédente, les directeurs de deux quotidiens avaient été convoqués pour avoir publié des informations politiques. Reporters sans frontières demande la levée des restrictions imposées à la presse.
Cinq directeurs de publication ont été interrogés par les autorités au cours des dernières 48 heures pour avoir fait paraître des pages blanches dans leurs journaux afin de protester contre la censure. "Cette mesure ne me fait pas peur. Je continue à écrire en faveur de la démocratie et de la liberté de la presse, et je suis prêt à aller en prison pour cette cause", a déclaré Kabir Rana de l'hebdomadaire Deshantar à Reporters sans frontières.
Reporters sans frontières déplore cette mesure d'intimidation contre des directeurs de publication courageux qui combattent la censure imposée par le roi depuis le 1er février. L'organisation réitère son appel à la levée de la censure.
Par ailleurs, Reporters sans frontières proteste contre le traitement infligé au reporter Swagat Nepal lors de son interrogatoire par des militaires à Katmandou.
Convocations à répétition
Le 23 février, Baman Prasad Neupane, chef du Bureau de l'administration du district de Katmandou, a interrogé pendant deux heures Kabir Rana, directeur de l'hebdomadaire Deshantar, et Rajendra Baidh, directeur de l'hebdomadaire Bimarsh, sur la publication de pages blanches dans leurs médias respectifs. Ils ont été libérés après avoir signé une lettre dans laquelle ils s'engagent à se présenter devant les autorités à chaque convocation. Le lendemain, Navaraj Timilsinha du Prakash, Gopal Budhathoki du Sanghu et Shashidhar Bhandari du Hank ont été interrogés par le même officiel.
Le 24 février, les directeurs de publication se sont accordés pour ne plus publier d'espaces blancs. "Nous allons remplir les espaces blancs avec des informations sur les problèmes sociaux, mais pas d'affaires politiques. (…) Je voulais montrer et dire à mes lecteurs que j'étais empêché d'exprimer mes opinions librement", a expliqué Gopal Budhathoki qui a passé vingt-deux jours en détention en mars 2002.
Le 16 février, les directeurs des quotidiens Rajdhani et Himalaya Times avaient été convoqués par le Bureau de l'administration du district de Katmandou pour avoir publié des informations politiques contraires à la déclaration royale du 1er février. Baman Prasad Neupane leur a demandé de les informer avant de publier des articles sur la situation politique. Les deux journaux n'ont pas traité de cette convocation dans leurs colonnes.
Afin de protester contre la censure, des journaux népalais, notamment le quotidien Kantipur, ont publié des éditoriaux sur le tir à l'arc ou la danse classique. De son côté, l'hebdomadaire Nepali Times avait publié, le 4 février, un éditorial abordant de manière métaphorique la situation politique. Intitulé "La forêt verte est la santé du Népal", il défendait la démocratie tout en parlant d'écologie.
Par ailleurs, Swagat Nepal, reporter et éditorialiste du quotidien Nepal Samacharpatra, a été détenu pendant plus de quatorze heures par des militaires à Katmandou. Il a été interpellé, le 21 février, en pleine rue, par des soldats en civil qui l'ont forcé à monter dans une jeep sans plaque d'immatriculation. Le journaliste a été interrogé pendant toute la nuit, assis sur une chaise et privé de nourriture et d'eau. Les militaires lui ont demandé de préciser ses liens avec les publications maoïstes telles que Janadesh. Il a été relâché dans la matinée du 22 février.