Au Yémen, cinq ans de violations dans l’Hadramaout

Alors que l’ancien gouverneur de la province yéménite de l’Hadramaout a terminé son mandat, RSF dresse son bilan en matière de protection des journalistes et appelle son successeur au respect de la liberté de la presse.

Parmi les régions contrôlées par le gouvernement officiel, la province de l’Hadramaout est celle où le plus grand nombre de violations a été enregistré, observe le bureau Moyen-Orient de RSF. Nous appelons le gouverneur nouvellement nommé, Mabkhout bin Madi, à inverser cette tendance et à montrer que les autorités reconnues par la communauté internationale entendent respecter les médias et protéger les journalistes.

Mabkhout bin Madi vient d’être nommé gouverneur de la province de l’Hadramaout, dans l’est du Yémen. Il succède à Farag Al-Bahsani, qui dirigeait la région depuis 2017. Contrairement à son successeur, parlementaire de formation, Farag Al-Bahsani est un militaire de carrière. Sous sa mandature, au moins quatre journalistes ont été emprisonnés, sans compter les interpellations d’une durée plus réduite, les poursuites judiciaires et les autres formes de pression exercées sur les travailleurs des médias.

La dernière en date, la journaliste indépendante Hala Badawi, a été détenue de décembre 2021 à avril 2022. Elle a été accusée “d’implication dans une cellule terroriste” après avoir partagé une publication sur Facebook dans laquelle elle rapportait des accusations de corruption visant le directeur du bureau du ministère de l'Éducation de la province.

De mai 2020 à avril 2021, c’est le photographe indépendant Abdullah Bukeir qui a été emprisonné sans charge sur ordre du gouverneur Al-Bahsani, selon des sources concordantes. Il avait partagé sur son compte Facebook une photographie d’une boîte de mouchoirs à l’effigie de l’officier, prise alors qu’il couvrait une conférence en sa présence. L’image avait suscité de nombreuses railleries. Abdullah Bukeir a mené une grève de la faim pour protester contre cette détention et a dû être hospitalisé à plusieurs reprises.

En décembre 2018, le rédacteur en chef du site d’information Al-Moharir, Sabri bin Makhashin (aujourd’hui basé en Égypte), a été emprisonné par les services de renseignement militaires, qui dépendent du gouverneur. En février de la même année, le rédacteur en chef du quotidien 30 November, Awad Kashmim, a été arrêté pour être libéré un mois plus tard. Il avait été démis de ses fonctions par Farag Al-Bahsani après avoir critiqué une opération militaire menée dans la région.  

Les journalistes indépendants en exil sont aussi pris pour cible. En septembre 2021, Mohamed Al-Sharfi, Mohamed Al-Yazidi, eux aussi originaires de l’Hadramaout, et de nouveau Sabri bin Makhashin, ont été menacés de mort par un responsable militaire en raison de leurs publications sur des faits de corruption dans la province. Les trois confrères considèrent le gouverneur comme pleinement responsable.

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