Agressions, menaces, arrestations : la presse doit bénéficier d'un climat plus favorable

Reporters sans frontières a adressé, le 1er juillet 2009, une lettre au chef de l'Etat nigérian, Umaru Musa Yar'Adua, pour lui exprimer son extrême inquiétude concernant les conditions d'exercice du métier de journaliste dans le pays. Au cours du premier semestre 2009, l'organisation a recensé 42 cas d'atteinte à la liberté de la presse et a constaté que dans la plupart des cas, la responsabilité de ces violations revenait à des agents de police ou des autorités locales telles que des gouverneurs de province. "Nous estimons, Monsieur le Président, qu'il est de votre devoir de réagir. En tant que chef de l'Etat garant de la Constitution et des libertés fondamentales, vous devez vous assurer que partout au Nigeria les journalistes peuvent exercer leur métier dans des conditions satisfaisantes, à l'abri des menaces, agressions physiques et autres poursuites judiciaires", a écrit Jean-François Julliard, secrétaire général de Reporters sans frontières. "Votre pays jouit de la liberté de la presse, chèrement acquise, mais les violences et les entraves menacent cet acquis, a poursuivi Jean-François Julliard. Nous vous demandons en priorité d'exiger de certains gouverneurs de province qu'ils cessent de s'acharner contre les professionnels des médias qui les dérangent. Nous vous demandons également de prendre des sanctions systématiques à l'encontre des agents de police qui s'en prennent aux journalistes". Depuis le 1er janvier 2009, 21 journalistes ont été agressés, huit ont été menacés, cinq ont été séquestrés pendant plusieurs heures, et trois autres ont été détenus entre vingt-quatre heures et une semaine. Trois médias ont été censurés, et un autre a été attaqué. Une succession d'incidents graves s'est produite au cours des derniers jours du mois de juin. Le 26 juin, le codirecteur de la station Freedom Radio, Alhaji Ado Mohamed, a été arrêté par neuf policiers de l'Etat de Kano (Nord), après la parution d'un article sur le site Internet Saharareporters. Le journaliste faisait état de l'implication du gouverneur de l'Etat dans l'assassinat par balles, le 13 avril 2007, de Sheikh Ja'afar Mahmoud Adam, professeur d'études coraniques à la mosquée Al Muntada à Dorayi. Inquiété pour avoir également évoqué cette affaire, Mallam Tukur Mamu, éditeur de l'hebdomadaire Desert Herald, vit caché depuis le 23 juin. Ce jour-là, le journaliste a reçu plusieurs messages téléphoniques lui indiquant que le gouverneur lui-même, Mallam Ibrahim Shekarau, "s'occuperait personnellement de lui" s'il continuait de publier des articles "nuisibles aux intérêts du gouvernement". Le 25 juin, à Asaba, chef-lieu de l'Etat du Delta (Sud), six journalistes ont été roués de coups par la police de l'Etat, alors qu'ils venaient couvrir la démolition de magasins clandestins. Parmi eux, Daniel Ayemere, de la Minaj Broadcasting International, a été conduit à l'hôpital dans un état grave. Le même jour, Kayode Adeji, journaliste pour le quotidien Next, Segun Adeleye, du quoditien indépendant Daily Independent, et Demola Oni, du quotidien The Punch, ont été molestés par les agents de sécurité du président de l'Assemblée de l'Etat d'Ogun (Sud-Ouest), Tunji Egbetokun. Par ailleurs, le gouverneur de l'Etat d'Ekiti (Sud-Ouest), Segun Oni, a décidé le 19 juin de fermer toutes les radios et les télévisions d'Etat, après une grève de journalistes réclamant de meilleures conditions de travail. Trois journalistes syndicalistes ont été sanctionnés. Le Nigeria se situe à la 131e place, sur 173 pays, du classement 2008 de la liberté de la presse établi par Reporters sans frontières. Depuis plusieurs années, le State Security Service (SSS - le redoutable service de police de la sécurité d'Etat) fait partie des prédateurs de la liberté de la presse dénoncés par l'organisation. Voir la lettre envoyée au président Umaru Musa Yar'Adua :
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Updated on 20.01.2016