Reporters sans frontières constate avec inquiétude que la situation du quotidien Noticias de Oaxaca devient de plus en plus critique. Ce dernier fait l'objet, depuis plus de trois mois, d'une « grève » qui s'apparente davantage à une tentative de le réduire au silence qu'à un véritable conflit syndical. Face au manque évident de volonté politique de régler cette affaire, Reporters sans frontières s'adresse directement au gouverneur de l'Etat d'Oaxaca.
Depuis le 17 juin 2005, les activités du quotidien Noticias de Oaxaca sont entravées par une « grève » de la Confédération révolutionnaire ouvrière et paysanne (CROC), apparemment orchestrée par le Parti révolutionnaire institutionnel (PRI) dont elle dépend, et dont fait partie le gouverneur de l'Etat de Oaxaca, Ulíses Ruiz Ortiz. Le 18 juillet, après avoir été retenus un mois par des « grévistes » dans les locaux du journal, les employés de Noticias en ont été expulsés par des membres de la CROC et n'y ont pas eu accès depuis.
Selon une information du CENCOS (Centre national de communication sociale), plusieurs journalistes de Noticias sont régulièrement menacés et insultés, certains ayant même fait l'objet de chantage de la part d'élus ou de fonctionnaires locaux qui proposaient de les payer s'ils « changeaient de camp ».
La même source indique que, le 12 septembre 2005, les comptes bancaires du quotidien Noticias ont été gelés. Selon David Peña, avocat du CENCOS, cette dernière mesure menace directement la survie du journal.
Face à l'enlisement de la situation, Reporters sans frontières adresse cette lettre ouverte au gouverneur Ulíses Ruiz Ortiz :
« Monsieur le Gouverneur,
Reporters sans frontières, organisation internationale de défense de la liberté de la presse, souhaite vous faire part, à nouveau, de son inquiétude concernant la situation du quotidien Noticias de Oaxaca, dont l'activité est gravement entravée, depuis près de trois mois maintenant, par une prétendue « grève » de la Confédération révolutionnaire ouvrière et paysanne.
Dans un courrier daté du 28 juin 2005, nous vous avions demandé de prendre les mesures nécessaires, dans les plus brefs délais, pour permettre la reprise de l'activité normale du journal. Nous constatons au contraire qu'un manque évident de volonté politique n'a fait qu'empirer la situation dans laquelle se trouve le quotidien.
Nous réitérons donc notre demande, en vous priant notamment de veiller à ce que la Commission locale de conciliation et d'arbitrage se prononce très rapidement et de façon objective sur la légalité de la grève qui est à l'origine de cette situation. Nous vous rappelons à ce propos qu'elle n'avait légalement que cinq jours pour le faire, et que cela fait maintenant plus de 90 jours qu'elle délibère. Elle a été beaucoup plus efficace pour décider, en septembre 2005, de geler les comptes bancaires de Noticias...
Nous souhaitons également que des mesures soient prises pour garantir l‘intégrité physique et psychologique des employés de Noticias, plusieurs d'entre eux étant régulièrement menacés et insultés par des fonctionnaires de votre administration ou des élus locaux.
Nous vous rappelons enfin que, quels que soient les liens qui existent entre le Parti révolutionnaire institutionnel, auquel vous appartenez, et la Confédération révolutionnaire ouvrière et paysanne, vous avez le devoir, en tant que gouverneur, de garantir la liberté de la presse dans l'Etat de Oaxaca.
En vous remerciant de l'attention que vous porterez à ce courrier et dans l'attente d'une amélioration rapide de la situation de Noticias, je vous prie d'agréer, Monsieur le Gouverneur, l'assurance de ma parfaite considération. »
Lettre signée par Robert Ménard, secrétaire général de Reporters sans frontières.