A l'occasion de la commémoration de l'assassinat, le 13 décembre 1998, du journaliste Norbert Zongo et de ses trois compagnons, Reporters sans frontières appelle tous les citoyens du Burkina Faso à porter le deuil, en guise de protestation pacifique contre le déni de justice que représentent les manquements des appareils judiciaire et politique du pays depuis huit ans.
A l'occasion de la commémoration de l'assassinat, le 13 décembre 1998, du journaliste Norbert Zongo et de ses trois compagnons, Reporters sans frontières appelle tous les citoyens du Burkina Faso à porter le deuil, en guise de protestation pacifique contre le déni de justice que représentent les manquements des appareils judiciaire et politique du pays depuis huit ans.
"Huit ans après le quadruple assassinat de Sapouy, le scandale d'un non-lieu injustifié est venu s'ajouter à la honte d'un déni de justice. En portant aujourd'hui un brassard ou des vêtements noirs, les Burkinabés peuvent montrer aux assassins de Norbert Zongo, Ernest Zongo, Ablassé Nikiema et Blaise Ilboudo qu'ils sont rejetés par la population. Ils peuvent aussi démontrer que le non-lieu rendu en juillet 2006 en faveur de Marcel Kafando ne saurait faire taire leur soif de justice. Aux côtés des amis et de la famille de Norbert, nous affirmons que la procédure judiciaire, mise en sommeil par le juge et le procureur, n'a pas été conduite avec la volonté de faire la lumière sur ce crime. Les tueurs de Sapouy ne sont pas en prison, et ce pour des raisons purement politiques", a déclaré Reporters sans frontières.
Rappel des faits
Norbert Zongo était le directeur de l'hebdomadaire L'Indépendant. Il a été retrouvé mort, avec trois autres personnes, carbonisés dans leur véhicule, le 13 décembre 1998, à Sapouy (Sud). Lorsqu'il a été tué, le journaliste enquêtait sur la mort suspecte de David Ouédraogo, chauffeur de François Compaoré, le frère du chef de l'Etat. Sous la pression de la rue, le président Blaise Compaoré a mis sur pied une Commission d'enquête indépendante (CEI), qui a identifié quelques mois plus tard "six principaux suspects" dans le quadruple assassinat.
En août 2000, trois militaires de la garde présidentielle, dont l'adjudant Marcel Kafando, ont été reconnus coupables d'"avoir séquestré et torturé à mort" David Ouédraogo. Ce dernier était soupçonné d'avoir volé de l'argent au frère du président. Il est mort sous la torture, quelques jours après avoir été arrêté par la garde présidentielle. En février 2001, Marcel Kafando a également été inculpé d'"assassinat" et "incendie volontaire" par le procureur général dans le cadre du dossier Norbert Zongo. Or, malgré une inculpation aussi grave, Marcel Kafando a coulé toutes ces années des jours tranquilles en liberté, à son domicile de Ouagadougou.
Le 19 juillet 2006, le juge d'instruction Wenceslas Ilboudo a finalement prononcé un non-lieu en faveur de "Marcel Kafando et X", sur la base de la rétractation d'un témoin à charge, huit ans après les faits. Cette décision a été confirmée en appel, éteignant ainsi la procédure visant à élucider l'assassinat de Norbert Zongo. Seuls de "nouveaux éléments" sont susceptibles de relancer l'enquête. Le 20 octobre 2006, Reporters sans frontières a remis au procureur du Faso la première version du rapport de la CEI, avant qu'elle ne soit édulcorée sous la pression de deux de ses membres, représentant le gouvernement. Certains passages du texte, détaillant les contradictions de François Compaoré dans sa déposition et le rôle joué par l'homme d'affaires Oumarou Kanazoé pour tenter de faire taire Norbert Zongo, avaient été purement et simplement supprimés. Les conclusions de la CEI y étaient beaucoup plus affirmatives et circontanciées sur le sujet, mettant plus précisément en cause les "six principaux suspects" désignés, tous membres de la garde présidentielle.