Un journaliste de Telesur mis en cause par les autorités dans un enlèvement commis par les FARC

Reporters sans frontières condamne les allégations du directeur de la police nationale colombienne, le général Oscar Naranjo, contre William Parra, collaborateur de la chaîne latino-américaine Telesur, qu'il a accusé de manipulation et de complicité avec les Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) dans l'enlèvement, le 4 juin 2007, du capitaine Guillermo Javier Solórzano. William Parra avait réalisé une interview de l'otage, qui devait être diffusée, le 25 novembre dernier, dans un documentaire intitulé “Voces desde de la selva” (“Voix depuis la jungle”). “Les accusations portées contre William Parra sont injustifiées et peuvent compromettre ses activités professionnelles et sa sécurité. Les propos du général Oscar Naranjo reviennent à dire qu'un journaliste serait complice de l'événement qu'il couvre. La liste des professionnels des médias stigmatisés par certaines autorités colombiennes ne cesse de s'allonger et certains ont récemment dû quitter le pays sous la menace. Nous demandons au gouvernement colombien de ne pas instrumentaliser les tensions avec le président Hugo Chávez concernant la libération d'otages des FARC au détriment de la liberté de la presse. Rappelons qu'un autre correspondant colombien de Telesur, Freddy Muñoz, a été menacé par des paramilitaires et détenu, il y a près d'un an, pour sa prétendue appartenance aux FARC, après la diffusion d'une photo trafiquée”, a déclaré Reporters sans frontières. L'entretien avec Guillermo Javier Solórzano, filmé au mois d'octobre, a été remis par William Parra à la sénatrice colombienne d'opposition Piedad Córdoba peu avant qu'il ne soit rendu public. La sénatrice a fait le voyage à Caracas pour présenter l'enregistrement au président Hugo Chávez. Le président colombien Alvaro Uribe avait mis fin, trois jours plus tôt, à la médiation de la parlementaire et de son homologue vénézuélien auprès des FARC. Les autorités colombiennes ont aussitôt accusé le journaliste de Telesur de manipuler l'émotion suscitée autour de cette preuve de vie pour mettre en valeur le rôle d'Hugo Chávez, alors que la vidéo avait été tournée avant qu'Alvaro Uribe ne lui confie le rôle de médiateur. William Parra “est impliqué dans le délit d'enlèvement puisque son rôle n'est pas d'enregistrer des preuves de vie dans les campements des FARC”, a déclaré le général Oscar Naranjo. Le directeur de police a demandé à William Parra de clarifier la nature de ses relations avec la guérilla et l'a accusé d'avoir fait pression sur la famille de l'otage pour qu'elle dise que la vidéo avait été tournée une semaine auparavant. Alvaro Uribe a relayé ces reproches dans un communiqué. William Parra a déclaré à Reporters sans frontières qu'il avait transmis à la famille de Guillermo Javier Solórzano l'interview, extraite de son documentaire, il y a plusieurs semaines, mais que le montage s'était achevé le 23 novembre. Les proches du capitaine ont déclaré au quotidien vénézuelien El Universal qu'aucun journaliste ne les a forcés à dire que les preuves de vie avaient été obtenues grâce à la médiation du président du Venezuela. Le Département administratif de sécurité (DAS) a proposé au journaliste une protection et a pris contact dans ce but avec Telesur. Camilo Romero, responsable de la correspondance de Telesur en Colombie a déclaré qu'il tenait le gouvernement colombien pour responsable de la sécurité des représentants de la chaîne présent dans le pays.
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Updated on 20.01.2016