Syrie : RSF dénonce le harcèlement d’un fixeur par les autorités kurdes

Cible de multiples interpellations par les services de sécurité liés à l'Administration autonome du Nord et de l'Est de la Syrie, le fixeur kurde Kamiran Saadoun a été contraint de s'exiler en Irak. Reporters sans frontières (RSF) dénonce des méthodes dignes des régimes les plus mafieux.

Après sa brutale interpellation par les forces de sécurité kurdes (Asayish) le 16 juin à Raqqa, le fixeur kurde Kamiran Saadoun a traversé la frontière irakienne, le 19 juin, pour se réfugier à Erbil. Fixeur depuis 2014, il a coopéré avec de nombreux médias internationaux tels que ABC News et NPR. Il a même remporté le prix Kurt Schork pour le meilleur fixeur en 2020, décerné par la fondation Thomson Reuters.


Contacté par RSF, le journaliste explique que son arrestation est survenue alors qu’il préparait un reportage avec une journaliste du quotidien néerlandais De Volkskrant. Des hommes armés l’ont capturé dans sa chambre d’hôtel au milieu de la nuit et l’ont emmené de force sans lui permettre d’informer sa consœur. Kamiran Saadoun a ensuite été introduit dans une voiture où on lui a bandé les yeux avant de l’amener à un centre de détention. Pendant ce trajet, le journaliste a été menacé avec un fusil et a reçu des coups de poings et des coups de pieds. Puis il a été soumis à un interrogatoire avant d'être libéré le lendemain matin.


Ce n'est pas la première fois que Kamiran Sadoun est poursuivi par les forces kurdes. Le fixeur indique avoir été la cible d’intimidations des Asayish depuis le début de l’année 2020, quand les autorités lui ont interdit d’exercer son métier pendant quatre mois pour “avoir nui à l’image des Forces démocratiques syriennes (FDS)”. 


Le 26 février, Kamiran Saadoun a été arrêté une première fois à un checkpoint près de la frontière irakienne après avoir raccompagné une journaliste étrangère. Il a finalement été relâché le même jour grâce à la pression de son entourage. Ces menaces sont devenues plus explicites au début du mois de mai quand le fixeur a été convoqué une deuxième fois et accusé d’avoir “franchi la ligne rouge” en communiquant des informations sur les tranchées et les positions militaires des SDF, ce que le fixeur dément. 


Les accusations portées contre Kamiran Saadoun sont très graves et inacceptables, dénonce la responsable du bureau Moyen-Orient de RSF, Sabrina Bennoui. Harceler et menacer un journaliste de la sorte parce que son travail dérange relève de méthodes dignes des régimes les plus mafieux. L'administration kurde doit tout faire pour que les coupables répondent de leurs actes, auquel cas son laisser-faire reviendra à un accord tacite."


Le cas de Kamiran Saadoun n'est pas isolé. Toujours le 16 juin, le journaliste indépendant Ahmad Mustafa Al-Hassan a également disparu avant de réapparaître quelques jours plus tard dans un centre de détention des FDS à Raqqa. Selon un décompte de RSF, c'est le quatrième journaliste à être emprisonné depuis le début de l'année.


La Syrie occupe la 173e place sur 180 pays au Classement mondial de la liberté de la presse 2021 établi par RSF.

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Mise à jour le 20.08.2021