Suède: RSF appelle l'ambassadeur de Chine à cesser de harceler les médias

Reporters sans frontières (RSF) condamne les attaques répétées de l’ambassade de Chine contre les journalistes suédois et rappelle qu’un poste diplomatique n’a pas à dénigrer le contenu éditorial des médias du pays qui l’accueille.

« Mais pourquoi est-il si méchant ? » C’est la question que se posent les journalistes suédois à propos de l’ambassadeur de Chine en Suède, Gui Congyou, qui depuis son entrée en fonction en août 2017 s’est lancé dans une véritable croisade contre les médias du pays. Le diplomate, qui a fait sa carrière entre l’ambassade de Chine en Russie et la direction Europe et Asie centrale du ministère des Affaires étrangères chinois, semble avoir du mal à comprendre qu’en Suède, pays en seconde position dans le Classement RSF de la liberté de la presse 2018, les journalistes n’ont pas de comptes à rendre à la censure.


Sur le site internet de l’ambassade, le diplomate s’est récemment fendu d’une longue diatribe non-signée contre SVT Nyheter, le principal portail d'informations numérique de Suède. Le diplomate reproche aux journalistes du site d’avoir donné une tribune, le 27 février dernier, au représentant taïwanais en Suède, David Liao, dans laquelle ce dernier plaide pour la démocratie taïwanaise face aux attaques de Pékin. Selon Gui Congyou, la publication de ce billet d’opinion est de nature à « remettre en cause le principe d’une seule Chine » et « équivaut à une provocation politique grave. » Pékin revendique très agressivement la souveraineté sur l’île de Taïwan, bien que cette dernière dispose depuis 1949 d’un gouvernement indépendant.


« Un poste diplomatique n’a pas à dénigrer le contenu éditorial des médias du pays qui l’accueille, rappelle Erik Halkjaer, président de Reporters sans frontières (RSF) Suède. Pour Cédric Alviani, directeur du bureau Asie de l’Est de RSF, ces attaques « sont révélatrices de l’attitude décomplexée avec laquelle Pékin tente désormais d’imposer sa censure hors de ses frontières. »


L’attaque contre SVT Nyheter n’est pas en effet un incident isolé. Depuis juillet 2018, l’ambassade de Chine à Stockholm s’en est pris à de nombreux médias suédois dont Dagens Nyheter (DN), Tidningarnas Telegrambyrå (TT), 8 Sidor, Upsala Nya Tidning, Dagens Samhälle, Nya Wermlands-Tidningen, Svenska Dagbladet (SvD).


L’ambassadeur semble particulièrement hargneux envers le journaliste suédois Jojje Olsson, auteur d’un ouvrage sur l’éditeur suédois Gui Minhai, enlevé en Thaïlande en 2015 et toujours détenu en Chine sans date de jugement prévue. En décembre dernier, il s’en est aussi pris au journaliste et commentateur suédois Kurdo Baksi, l'accusant  « d'incitation à la haine contre la Chine. »


La Chine est l’une des plus grandes prisons du monde pour les journalistes, avec plus de 60 d’entre eux derrière les barreaux. Dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2018 publié par RSF, le pays stagne au 176e rang sur 180.

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Mise à jour le 19.03.2019