RSF salue la libération de Reyot Alemu et de journalistes de Zone 9

A la veille d'une conference internationale sur le financement du développement, le gouvernement éthiopien a, de façon inattendue, décidé de libérer la journaliste Reyot Alemu, deux blogueurs de Zone 9 et des trois journalistes arrêtés avec eux. Quatre autres blogueurs et de nombreux journalistes demeurent incarcérés. Reyot Alemu, éditorialiste pour l’hebdomadaire aujourd'hui défunt Fitih, et qui fait partie des 100 héros de l’information identifiés par RSF, a été libérée de façon conditionnelle ce matin. Elle avait été condamnée en 2011 à 14 ans de prison pour "participation à une organisation terroriste et préparation d’une attaque terroriste", avant de voir sa peine réduite à 5 ans en 2012. Selon le ministère de la Justice, sa libération fait suite à un recours déposé par son avocat arguant du fait qu'elle a déjà purgé les deux tiers de sa peine. Son confrère, Woubeshet Taye, directeur adjoint de l’hebdomadaire Awramba Times, condamné en même temps qu'elle, est lui toujours derrière les barreaux. Les deux blogueurs du mouvement Zone 9, Mahlet Fantahun et Zelalem Kibret ainsi que les trois journalistes qui avaient été arrêtés en même temps qu'eux en avril 2014, Tesfalem Waldyes, d’Addis Standard, Edom Kasaye, ancienne employée d’Addis Zemen, et Asmamaw Hailegiorgis, d’Addis Guday, ont été relâchés la veille, le 8 juillet 2015, après que toutes les charges contre eux aient été abandonnées. Quatre autres blogueurs du collectif, Atnaf Berhane, Befekadu Hailu, Abel Wabellaet Natnail Feleke demeurent à ce jour incarcérés et accusés de participation à l'organisation terroriste Ginbot 7. Ils risquent jusqu'à 15 ans de prison. Le collectif de blogueurs Zone 9 vise à offrir un regard alternatif sur l’actualité éthiopienne. Ces libérations inattendues interviennent une semaine à peine avant la tenue de la Troisième conférence internationale sur le financement du développement organisée à Adis Abeba par les Nations-unies, et alors que le président américain Barack Obama prévoit un déplacement pour la fin du mois dans le pays. “Nous ne pouvons évidemment qu'être soulagés par l'annonce de ces libérations, surtout lorsque l’on connaît les conditions de détention dans les geôles éthiopiennes", commente Cléa Kahn-Sriber responsable du bureau Afrique de Reporters sans frontières, Mais il ne faut pas oublier que quatre autres blogueurs sont toujours poursuivis pour les mêmes accusations fallacieuses, et que plusieurs journalistes sont encore emprisonnés pour avoir simplement fait leur travail. Ces libérations ne doivent pas être seulement de circonstance, à l’approche d’un rendez-vous international important. Le gouvernement éthiopien nouvellement installé doit engager un revirement net sur la question de la liberté de l’information, permettre d’autres libérations, et faire en sorte que les journalistes soient capables de faire leur travail sans être inquiétés. La liberté de l’information est une condition essentielle du développement.” Si l'Ethiopie fait figure de meilleur élève du développement dans la région, son bilan en terme de respect des libertés individuelles lui est souvent reproché. La loi sur le terrorisme de 2009 notamment est couramment utilisée pour museler toute voix discordante, en premier lieu celle des journalistes. L'année passée, 6 publications ont du fermer devant les menaces et des dizaines de journalistes ont fui le pays. L’Ethiopie est classée à la 142ème place sur 180 pays dans l'édition 2015 du Classement mondial de la liberté de la presse de Reporters sans frontières.
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Updated on 20.01.2016