RSF exige une enquête indépendante sur le meurtre du journaliste pakistanais Ali Sher Rajpar
Reporters sans frontières (RSF) demande qu’une enquête impartiale permette de faire toute la lumière sur l’assassinat d’un journaliste de la province du Sindh, dans le sud-est du Pakistan. Célèbre pour ses enquêtes sur des soupçons de corruption concernant un responsable municipal, le reporter avait demandé une protection de la police.
Le modus operandi est glaçant : dans la soirée du samedi 4 mai, alors qu’il venait de verrouiller le portail du Club de la presse de la ville de Padidan, dont il était le président, Ali Sher Rajpar a été criblé de cinq balles tirées à bout portant. Le journaliste d’une trentaine d’année travaillait pour le groupe de presse Awami Awaz, qui publie notamment le principal quotidien régional en sindhi.
Le procès-verbal de la plainte déposée par son frère, en date du 5 mai, et dont RSF a pu se procurer une copie, cite comme principal suspect le chef de la municipalité, Shakeel Ahmed Rajpar, qui avait plusieurs fois menacé le journaliste. Ali Sher Rajpar avait récemment publié plusieurs articles relatant des actes de corruption dans lequel l’édile serait lié.
Contactés par RSF, des membres du Club de la presse de Padidan ont confirmé que le journaliste d’investigation se sentait menacé à cause de son travail, au point qu’il avait demandé une protection de la police de son district de Naushahro Feroze trois jours avant son assassinat sauvage. En vain.
“Il est inacceptable que l’on doive déplorer le meurtre d’un journaliste qui avait clairement informé les autorités des menaces qui pesaient sur lui, déclare Daniel Bastard, responsable du bureau Asie-Pacifique de RSF. Les zones d’ombre qui entourent cet assassinat sont nombreuses, et aucun doute ne doit subsister sur les éventuelles complicités des uns et des autres. C’est pourquoi nous appelons les plus hautes autorités de la province du Sindh à faire toute la lumière sur ce meurtre effroyable en diligentant une enquête parfaitement indépendante.”
Deux journalistes tués en quatre jours
Pour sa part, la police locale, citée de façon anonyme par le quotidien Dawn, affirme avoir arrêté dès le lendemain de ce drame le propre cousin du journaliste, un certain Habeeb Rajpar - privilégiant pour l’heure la piste d’un conflit familial pour expliquer le meurtre du reporter.
L’assassinat d’Ali Sher Rajpar intervient quatre jours après qu’un autre journaliste pakistanais, Malik Amanullah Khan, a été abattu de quatre balles dans le district de Dera Ismail Khan, dans le nord du pays. Il était lui-même président du Club de la presse de sa ville de Parowa. La police n’a pour l’heure procédé à aucune arrestation.
En chute de trois places par rapport à 2018, le Pakistan se situe en 142e position sur 180 pays dans la nouvelle édition du Classement mondial de la liberté de la presse que RSF a récemment publié, mettant en avant un mécanisme de la peur.