Regain de violences en Albanie : RSF appelle les autorités à protéger les journalistes
Les manifestations pour réclamer le départ du Premier ministre qui se multiplient depuis bientôt quatre mois en Albanie sont émaillées de graves violences, notamment à l'égard des journalistes. Reporters sans frontières (RSF) s’inquiète de ces attaques répétées et exhorte les autorités à protéger les reporters.
Depuis quatre mois en Albanie, pas un samedi ne se passe sans qu’il faille déplorer de graves blessures chez les journalistes qui couvrent les manifestations exigeant le départ du Premier ministre Edi Rama sur lequel pèsent des soupçons de corruption. Les 11 et 12 mai 2019, les violences sont montées en intensité et les manifestants qui prenaient pour cible le bureau du Premier ministre s’en sont pris physiquement aux reporters. RSF a dénombré pas moins de quatre attaques importantes.
Besfort Kryeziu, caméraman de la chaîne privée Top Channel TV a été blessé par un jet de cocktail molotov sur la tête a reçu des soins à l’hôpital tandis qu’ au même moment, ses confrères Eno Xhaja (Top Channel TV) et Mateo Brahja (ABC News) étaient brutalisés par des manifestants en colère qui les ont empêchés de filmer avant de casser leur matériel. Un autre journaliste, Arsen Rusta (Report TV) a rapporté avoir subi des menaces importantes.
“RSF s’insurge contre le climat d'intimidation et de violence à l’égard des journalistes qui règne actuellement et appelle les autorités à prendre des mesures immédiates pour que cessent les attaques, déclare Pauline Adès-Mével, responsable de la zone UE-Balkans de RSF. Les efforts de réforme démocratique du pays et ses perspectives de progrès sur le chemin vers l'Union européenne passent par la condamnation sans détour de cette violence et de la rhétorique de certains élus à l’égard de la presse. Au vu de la situation politique actuelle et à l’aube des élections locales du 30 juin, RSF s’inquiète que de nouveaux incidents puissent porter préjudice à l’image de l’Albanie et au processus d'intégration de l'Albanie à l'UE.”
RSF s’était inquiétée dès le début du mouvement du niveau de violences pendant les manifestations , deux journalistes, Isa Myzyraj (Ora News TV) et Marsela Karapanço (A2 News CNN Albania) ayant été conduites à l'hôpital le 16 février après avoir été exposées à des gaz lacrymogènes.
Le 13 avril, RSF avait également déploré les blessures dont avaient été victimes deux journalistes Eliza Gjediku de la chaîne TV Tema et le photo reporter indépendant Arben Dajçi, blessés lors de manifestations de l’opposition à Tirana.
Illustration de la défiance à l’égard de la profession dans un climat de chaos politique sans précédent, certains femmes journalistes font état d’une atmosphère nauséabonde : Ola Xama reporter pour la chaîne TV Klan a raconté avoir été agressée verbalement et physiquement par un garde national républicain au parlement albanais au mois d’avril tandis que le 25 mai c’est Enkelejda Mema journaliste pour le même média qui subissait de graves insultes sexistes de la part du directeur de l’Académie des sciences, Skender Gjinushi.
L’Albanie a reculé de 7 places et se situe à la 82e place sur 180 pays dans le Classement de la liberté de la presse 2019 établi par Reporters sans frontières.