Prisonnière depuis 2009, une jeune journaliste est hospitalisée dans un état grave

La journaliste Yirgalem Fisseha Mebrahtu, privée de sa liberté depuis son arrestation en février 2009, est hospitalisée dans la capitale Asmara depuis le début de l'année 2012, a appris Reporters sans frontières. L'organisation se dit extrêmement inquiète pour sa santé et très préoccupée par ses conditions de détention. «Alors que les regards du monde entier sont actuellement tournés vers les massacres en Syrie ou la violente répression de moines tibétains qui protestent de façon spectaculaire en s'immolant par le feu, le sort de l'Erythrée continue de ne susciter qu'indifférence. Pourtant, les citoyens de ce pays – parmi lesquels 32 journalistes au moins sont emprisonnés sans raison ni aucune forme de procès, certains depuis plus de dix ans – sont soumis à un pouvoir non moins cruel que celui de Damas ou de Pékin», a déclaré Reporters sans frontières. «Le gouvernement d'Issaias Afeworki a déjà laissé mourir au moins quatre journalistes en détention. Il n'autorise aucune information sur plusieurs autres dont on ignore s'ils sont en vie. Il joue aujourd'hui avec celle de Yirgalem Fisseha Mebrahtu», a ajouté l'organisation, qui dénonce l'apathie de la communauté internationale qui s'accommode de la tragédie érythréenne depuis 2001. D'après les informations recueillies par Reporters sans frontières, Yirgalem Fisseha Mebrahtu se trouve à l'hôpital Halibet, à Asmara, dans un état sérieux. La jeune femme avait été admise dans cet hôpital à deux reprises, en novembre 2011 et en janvier 2012. Elle y est désormais gardée de manière permanente et ne peut recevoir de visite. La nature de la maladie dont elle souffre n'a pas été communiquée à ses proches, mais son traitement nécessite l'achat de médicaments à l'étranger. La journaliste et poète originaire d’Adi Keyeh (Sud) avait été arrêtée le 22 février 2009, à l’occasion d’une rafle qui avait touché l’ensemble de Radio Bana, la station où elle travaillait. Elle est soutenue par Reporters sans frontières et parrainée, comme son confrère emprisonné Dawit Isaac, par la section espagnole de l’organisation.  Au chapitre des rares bonnes nouvelles, Reporters sans frontières a appris que le journaliste Said Abdulhai, qui avait été arrêté au cours de la dernière semaine du mois de mars 2010, a été libéré il y a plusieurs mois. Vétéran de la guerre d’indépendance contre l’Ethiopie, diplômé de l’université de Benghazi en Libye dans les années 1980, il est l’un des fondateurs du département des médias après la libération. A une époque directeur du département de la presse au ministère de l’Information, il avait ensuite été responsable de l’agence de presse érythréenne et du journal progouvernemental en tigrinya, anglais et arabe. Employé au ministère des Affaires étrangères au moment de son arrestation, il travaille désormais au ministère de l'Education. Certains de ses confrères continuent de fuir le pays pour échapper à la dictature et à une possible arrestation. Ainsi le journaliste du service en amharique de la radio publique Dimtsi Hafash et de la chaîne publique Eri-TV, Senay Gebremedhin, employé du ministère de l'Information pendant 14 ans, a réussi à gagner l'Ethiopie voisine en janvier 2012. Un autre, dont l'anonymat est préservé pour des raisons de sécurité et qui a fui à la même période que Senay Gebremedhin, vient d'entrer en contact avec Reporters sans frontières pour obtenir de l'assistance. Plus d'informations sur l'Erythrée Lire aussi l'ouvrage de Léonard Vincent, intitulé Les Erythréens, paru en janvier 2012 aux éditions Rivages. Enfin, écouter les deux émissions 'Rendez-vous avec X' diffusées sur la radio publique française France Inter, en mars 2012 : - «L'Erythrée sous l'emprise du dictateur Issaias Afeworki» (1/2) - «L'Erythrée sous l'emprise du dictateur Issaias Afeworki» (2/2) Une conférence de presse, à Stockholm, sur Dawit Isaac Le 22 mars dernier, la section suédoise de Reporters sans frontières a organisé une conférence de presse, à Stockholm, exposant les démarches juridiques entreprises par l’organisation pour défendre le journaliste emprisonné Dawit Isaac. [_GoBack-] 'Nous sommes à un tournant. L'affaire Dawit Isaac a progressé d'un nouvel échelon', a indiqué l'avocat Percy Bratt. 'Le gouvernement érythréen doit tenir parole au sujet du journaliste emprisonné Dawit Isaac et le présenter devant une cour sans délai', a ajouté Jesper Bengtsson, président de la section suédoise de Reporters sans frontières. Une ordonnance d'Habeas Corpus a été envoyée à la Cour suprême érythréenne par Reporters sans frontières en juillet 2011, et une seconde copie a également été remise par la délégation de l'Union européenne à Asmara. Le Parlement européen et le gouvernement suédois soutiennent tous deux cette action. Il est aujourd'hui confirmé que la Cour a bien réceptionné l'ordonnance, signée par les avocats Me Jesús Alcalá, Me Prisca Orsonneau et Me Percy Bratt. L'idée fondamentale derrière cette vieille pratique juridique qu'est l'Habeas Corpus est que personne ne possède le pouvoir de détenir arbitrairement et au secret des individus sans que soit effectué un contrôle par une cour de justice. Le droit de soumettre une ordonnance d'Habeas Corpus est garanti par la loi érythréenne, telle qu'énoncée dans les articles 19 et 20 du Code de procédure pénale et 179 du Code de procédure civile érythréen, ainsi que par la Commission africaine des droits de l'Homme et des peuples. La Cour doit maintenant décider s'il existe une base juridique pour maintenir le journaliste en prison. En vertu des procédures pénales érythréennes, une personne ne peut être détenue plus de vingt-huit jours. Il doit alors soit être poursuivi, soit relâché. Dawit Isaac n'a toujours pas été poursuivi ou condamné depuis qu'il a été arrêté, il y a dix ans. Cette action est soutenue par les rédacteurs en chef de 21 journaux dans sept pays européens : El País, Gazeta Wyborcza, Berliner Zeitung, Frankfurter Rundschau, Der Spiegel (Spiegelonline), Stuttgarter Zeitung, TAZ, Iltalehti, Helsingin Sanomat, Hufvudstadsbladet, Berlingske, BT, Ekstrabladet, Aftenposten, Dagbladet, Verdens Gang, Aftonbladet, Dagens Nyheter, ExpressenGöteborgs-Posten et Svenska Dagblade.   Pour plus d'informations, contacter Björn Tunbäck, Reporters sans frontières – Suède : + 46 703 27 09 12
Publié le
Updated on 20.01.2016