Nicaragua : un journaliste en exil à nouveau la cible de menaces
Un journaliste d’investigation nicaraguayen en exil a reçu de nouvelles menaces, qui ciblent également sa famille. Reporters sans frontières (RSF) dénonce le climat de haine qui pèse sur les journalistes critiquant ouvertement le gouvernement de Daniel Ortega.
“Si tu continues à raconter des conneries, on va te couper la langue.” La lettre anonyme adressée au journaliste Gerall Chávez, exilé au Costa-Rica, était accompagnée d’une vidéo simulant sa décapitation. Ces deux terribles menaces, rendues publiques par le journaliste le 25 juillet dernier sur son compte Twitter, s’adressaient également aux membres de sa famille, qui vivent toujours au Nicaragua.
Gerall Chávez, qui travaillait pour Vos TV, avait quitté son pays à la fin 2018, quelques jours après l’arrestation de son confrère et de sa consœur Miguel Mora et Lucia Pineda Ubau. Spécialiste des enjeux politiques et ayant notamment couvert la vague de manifestations populaires qui agitait le pays entre avril et août 2018, il avait été la cible de menaces constantes et de campagnes de diffamation sur les réseaux sociaux de la part des supporteurs du président Daniel Ortega, qui avaient été jusqu’à peindre les mots “plomo” (“plomb”) et “No olvidamos” (“Nous n’oublions pas”) sur les murs de son domicile. Devant ces menaces, il s’était vu contraint de s'exiler au Costa-Rica, comme tant d’autres journalistes victimes de la forte répression gouvernementale. Gerall Chávez y a fondé le site d’info Nicaragua Actual, à travers lequel il continue d’informer sur la situation de son pays, notamment en documentant la situation des exilés.
“Les menaces de décapitation et de mutilation contre le journaliste Gerall Chavez et sa famille sont extrêmement choquantes et démontrent que les journalistes critiquant ouvertement le gouvernement de Daniel Ortega continuent d’être perçus comme des ennemis publics, déclare Emmanuel Colombié, directeur du bureau Amérique latine de RSF. Nous rappelons que l’État nicaraguayen a l’obligation de protéger les journalistes menacés en raison de leur activité professionnelle, ainsi que leur famille.”
Gerall Chávez n’est pas un cas isolé. Le 27 juillet, le Mouvement des journalistes indépendants du Nicaragua (PCIN) a publié un rapport dans lequel sont recensés 351 cas d’exactions contre la presse entre le 1er mars et le 25 juillet 2020, dont des agressions physiques, des menaces, des cas de harcèlement, des campagnes de diffamation et des procédures judiciaires injustifiées.
Le Nicaragua occupe la 117e position sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2020 établi par RSF.