Lettre de prison de Suwicha Thakor

Reporters sans frontières renouvelle auprès du roi Bhumibol Adulyadej de Thaïlande sa demande de grâcier neuf blogueurs (voir le communiqué de presse : http://www.rsf.org/Demande-de-grace-royale-en-faveur.html), dont Suwicha Thakor, en publiant sa lettre, écrite en prison. Sa demande personnelle a mystérieusement disparu de son dossier. Suwicha Thakor a été condamné le 3 avril 2009 pour "crime de lèse-majesté" à 10 ans de prison, sans preuves et sans que celui-ci n'ait jamais publié quoi que ce soit sur le roi. Reporters sans frontières est par ailleurs profondément choqué du licenciement de Suwicha Thakor par la compagnie Brandt qui ne semble guère s'être posé de questions sur la légitimité de l'accusation portée contre son ancien employé. Lettre du 5 décembre 2009 : "Cher tous, J'ai été arrêté en janvier 2009, juste après avoir déposé mes enfants à l'école dans la province de Nakhomphanom. J'ai été emmené à Bangkok et placé en détention, sans caution possible. J'ai été condamné à 10 ans de prison sur la base de la loi contre le lèse-majesté sur Internet. Depuis, ma famille et moi sommes profondément bouleversés. Nous avons envoyé une lettre d'excuses au Roi, mais je n'ai pas autant de chances que Harry Nicolaides [voir le communiqué : [http://www.rsf.org/spip.php?page=article&id_article=30368->http://www.rsf.org/spip.php?page=article&id_article=30368) car je suis thaïlandais, alors même que nous sommes dans le même cas. Je suis coupable, je l'admets, mais coupable de quoi ? Je suis devenu une victime des offenses politiques à cause de l'incident du 19 août 2006 (coup d'Etat militaire mené par le général Sonthi Boonyaratglin). Je proteste contre cela, il n'est pas juste que les autorités me reprochent autant et me condamnent à 10 ans de prison. 1. Où sont les responsables ? 2. Comment est-ce que ma famille va vivre ? Personne ne répond à ces questions et les autorités me considèrent comme un danger car pour eux ce que j'ai dit est dangereux pour la sécurité nationale et je dois payer pour ça. En réalité, je suis père de trois enfants et j'ai bâti une carrière professionnelle honnête. Je n'ai aucun passé criminel et je n'ai aucune affiliation politique. Je suis juste un père de famille. J'aurais accepté n'importe quel arrangement ou avertissement s'ils avaient discuté avec moi, s'ils m'avaient donné la parole. Mais ils ne l'ont jamais fait. Ils m'ont juste kidnappé sans informer personne et m'ont gardé comme un mort vivant. Je n'ai pas vu mes enfants depuis un an. Ils me manquent énormément et cela me rend malade. Mes enfants souffrent de plus en plus cruellement de l'absence de leur père. Le plus important pour moi est de rester sain et sauf en prison, je n'imagine pas comment ma famille ferait autrement. Mais je dois me défaire de tout et oublier ma famille. Mon épouse n'a pas d'emploi, et j'ai été viré sans aucune compensation financière par ma compagnie (voir la lettre de licenciement en portfolio). J'ai tout perdu avec ma liberté, la moitié de ma vie s'en est allée. Je suis désespéré car je ne peux absolument rien contrôler. J'apprécierais énormément si vous pouviez aider ma famille comme vous pouvez. A présent, je laisse la vie se dérouler, en ne pensant qu'au présent, en priant et en méditant. Le futur (La liberté ?), je ne peux pas le voir. Quel qu'il soit, je le laisse venir. Merci, Suwicha Thakor"
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Updated on 20.01.2016