Le reporter pakistanais Abid Hussain tué pour avoir enquêté sur le trafic de drogue au Pendjab

Des premiers éléments d’instruction confirment que la mort du journaliste Abid Hussain, décédé le 23 août après avoir été roué de coups la veille, est liée à ses activités journalistiques. Il avait publié plusieurs articles sur le trafic de drogue dans sa province du Pendjab.


“Tu mérites une leçon pour avoir enquêté sur nous !”... C’est ce qu’aurait crié l’un des assaillants du jeune journaliste Abid Hussain, avant de le rouer de coups de crosses, notamment à la tête, le 22 août dernier dans le district de Vehari, au Pendjab, dans l’est du Pakistan. Le reporter est mort le lendemain, à l’hôpital du district voisin de Multan.


Les circonstances du drame ont été décrites en détail par le propre père de la victime Ghulam Farid, qui était présent au moment de l’attaque. Selon le procès-verbal que RSF a pu se procurer aujourd’hui mercredi 29 août, la plainte qu’il a déposée précise que “les assaillants ont menacé tous ceux qui nous entouraient qu’ils subiraient le même sort s’ils s’interposaient”. Le père du journaliste a identifié deux d’entre eux, Tahir Hussain et Muhammad Imran, qu’il décrit comme des “criminels”, sur les activités desquels son fils avait eu le malheur d’enquêter.


“Les raisons de la mort de mon fils sont clairement établies dans le procès verbal”, a résumé Ghulam Farid à RSF. Il a déposé plainte en compagnie de journalistes locaux, qui décrivent les coupables présumés comme des “figures influentes” : “Abid Hussain a publié plusieurs articles sur le trafic de drogue dans la région, et les prévenus sont des trafiquants de drogues notoire”, a déclaré à RSF Muhammad Ilyas, le président du Club de la presse de Sahuka, qui chapeaute le district. Enquêteur opiniâtre, le journaliste travaillait pour le quotidien Daily Sagemail.


Lutter contre l'impunité


“Un nouveau drame frappe la communauté des journalistes au Pakistan. Il est grand temps que les autorités prennent des mesures concrètes pour assurer la sécurité physique des reporters, prévient Daniel Bastard, responsable du bureau Asie-Pacifique de RSF.


"Nous appelons le gouvernement provincial du Punjab à tout faire pour s’assurer que les assassins d’Abid Hussain soient conduits devant la justice. Au niveau national, le Premier ministre Imran Khan doit aussi profiter de la nouvelle législature, issue des élections du mois dernier, pour faire adopter un texte ferme et concret en faveur de la protection des journalistes et contre l’impunité dont bénéficie ceux qui les visent.”


Abid Hussain est déjà le troisième journaliste assassiné cette année au Pakistan. Le 27 mars, Zeeshan Ashraf Butt, 29 ans, était abattu par balles alors qu’il tentait d’interviewer un président de conseil communal dans le nord du Pendjab. Le 1er mars, le secrétaire de rédaction Anjum Muneer Raja a succombé à six blessures par balles dans une zone ultra-sécurisée de Rawalpindi, dans la banlieue d’Islamabad. Ses assassins n’ont à ce jour pas été retrouvés.


Le Pakistan se situe en 139e position sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2018 établi par RSF.


Publié le
Mise à jour le 29.08.2018