La loi sur les médias demeure inacceptable malgré les amendements
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Reporters sans frontières prend note de l’adoption des amendements à la loi sur les médias, hier soir, par le Parlement hongrois. Malgré des avancées positives sur quelques-uns des points les plus aberrants, le cœur du problème reste toutefois entier, puisque la composition et les attributions du tout-puissant Conseil des médias restent inchangées. Les gouvernements européens doivent faire comprendre à leur homologue hongrois que ce vote ne le dédouane pas d'efforts supplémentaires pour rendre sa législation conforme au droit international.
Dans la soirée du 7 mars 2011, les parlementaires hongrois ont adopté les amendements qui leur avaient été proposés par le gouvernement. Présentés par celui-ci comme de simples « éclaircissements » de la loi adoptée fin décembre, ces changements cosmétiques répondent dans l’ensemble aux demandes de la Commissaire européenne Neelie Kroes. Le satisfecit adressé par la Commission à l’issue du vote nous semble prématuré, alors que la loi demeure extrêmement critiquée et critiquable.
Si la notion contestée d’« équilibre de l’information » ne s’applique désormais plus aux blogs, elle concerne toujours les autres médias audiovisuels, ainsi que les services en continu sur Internet. De même les dispositions de la loi ne s’appliquent-elles plus aux médias étrangers… « sauf s’ils émettent à destination du public hongrois et sont installés à l’étranger dans le but d’échapper à la loi hongroise » ! Le plus grand flou demeure quant à savoir comment de tels faits seront établis.
Le champ des « offenses » punies par la loi est légèrement restreint, autour de la notion d’incitation à la haine ou à la discrimination. En revanche, les journalistes sont toujours tenus, sous peine d’amendes astronomiques, de respecter la « moralité publique » et la « dignité humaine », notions qui doivent être définies par le Conseil des médias.
Enfin, les médias hongrois ne seront plus tenus d’être accrédités auprès des autorités avant de commencer à émettre, mais ils devront le faire dans les 60 jours suivant le début de leurs activités, sous peine d’une amende de 3700 euros. Le nombre d’informations à fournir pour obtenir cette accréditation est toujours très important, allant du nombre d’abonnés prévu à la description des programmes destinés aux minorités ethniques.
Surtout, le Conseil des médias, créé par la loi de décembre 2010, n’est pas remis en cause. C’est pourtant cette pieuvre aux attributions démesurées qui est au centre de la polémique. Ses cinq membres, directement nommés par le gouvernement, appartiennent tous au parti au pouvoir Fidesz. Au terme de la loi, ce corps à l’impartialité douteuse peut pourtant exiger des médias toutes sortes de documents confidentiels – faute de quoi, ceux-ci seront passibles d’une amende de 100 000 euros.
Les amendements adoptés hier n’ont apporté aucune garantie supplémentaire à la protection des sources des journalistes, et les sanctions prévues pour les médias contrevenant à la loi vont toujours jusqu’à la suspension.
Reporters sans frontières réitère donc son appel au législateur hongrois afin que celui-ci revoie plus profondément la loi, et en particulier qu’il annule purement et simplement les dispositions créant le Conseil des médias. Le Parlement et le gouvernement hongrois doivent de toute urgence prendre en compte les recommandations en ce sens du Conseil de l’Europe et de l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE).
Photo: AFP/Getty Images
Publié le
Updated on
20.01.2016