Kenya : RSF condamne la suspension prolongée de deux chaînes de télévisions

Une semaine après avoir défié l’interdiction de diffuser la prestation de serment du chef de l’opposition, deux chaînes de télévision sont toujours privées d’antenne, en dépit d’une décision de justice en leur faveur. Reporters sans frontières (RSF) appelle le gouvernement à autoriser au plus vite ces chaînes à reprendre l’antenne et à cesser ses tentatives de réprimer la liberté d’informer.

Cela fait maintenant une semaine que Citizen TV et la chaîne de télévision communautaire Inooro TV sont interdites de diffusion après avoir retransmis en direct la prestation de serment symbolique de l’opposant Raila Odinga. Et ce malgré une décision de la Haute Cour du Kenya qui avait ordonné au gouvernement le 1er février dernier d’autoriser ces médias à reprendre provisoirement leurs émissions dans l’attente d’un jugement de fond. Le ministre de l’Intérieur en a cependant décidé autrement. Fred Matiangi a officiellement déclaré que ces médias resteraient coupés et a même qualifié certains journalistes de complices de la NASA (National Super Alliance), la coalition des partis d’opposition au Kenya.


Dans sa ligne de mire figure notamment Linus Kaikai, journaliste pour Nation Media Group qui gère la chaîne NTV. Le 31 janvier des policiers en civil armés se sont postés devant le siège de son groupe de presse. Averti par des sources policières que lui et deux de ses confrères seraient arrêtés s’ils sortaient, les journalistes ont passé la nuit dans leur bureau. Trois jours auparavant, Linus Kaikai, qui est également président de la Corporation des Editeurs Kenyans (Kenya Editors’ Guild) avait relayé sur son compte twitter une déclaration dénonçant une tendance du gouvernement à censurer les médias.


Le 31 janvier dernier, ce sont en tout quatre chaînes de télévision qui avaient été fermées, pour avoir défié l’ordre du président Uhuru Kenyatta de ne pas retransmettre la cérémonie d’investiture de son principal opposant politique, Raila Odinga. Mais pour l’instant, seules deux d’entre elles, NTV et KTN, ont pu reprendre leurs programmes le 5 février.


La décision de la Haute Cour n’est pas une mesure à géométrie variable. L’ensemble des médias qui ont été privé de transmission doivent pouvoir émettre à nouveau comme en décidé la justice kenyane, déclare RSF. Leur suspension prolongée est une décision politique qui nuit à l’indépendance des médias et restreint un peu plus le droit à l’information qui est pourtant garanti dans la Constitution.


Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme a exprimé son inquiétude quant aux tentatives du gouvernement d'interférer sur le droit à la liberté d'expression notamment en menaçant de révoquer les licences des télévisions qui diffuseraient l’investiture symbolique du principal opposant au président kenyan.


Le Kenya occupe la 95ème place sur 180 dans le Classement mondial 2017 de la liberté de la presse de RSF.

Publié le
Updated on 06.02.2018