Iran : les femmes journalistes et les familles de reporters visées par des arrestations arbitraires

En moins d’un mois, deux femmes journalistes indépendantes et la mère d’un photojournaliste ont été convoquées par la justice pour purger une peine de prison en Iran. Reporters sans frontières (RSF) dénonce ces condamnations systématiques.

Farangis Mazloom, la mère du lauréat du prix RSF 2017 dans la catégorie journaliste-citoyen, Soheil Arabi, va devoir purger une peine d' un an de prison ferme. Elle a été informée de cette décision le 20 octobre 2021, par la première chambre du parquet d’application des peines de la prison d’Evin, alors que la justice iranienne l’a condamnée, en mars, pour “réunion et complot contre la sécurité nationale” et “propagande contre le régime”. Son crime : avoir alerté l’opinion publique sur les conditions de détention de son fils et avoir protesté contre les traitements inhumains et dégradants qui lui sont infligés. 


Soheil Arabi a été arrêté fin 2013. Le journaliste citoyen et photojournaliste, victime d’un harcèlement judiciaire et “disciplinaire” arbitraire et illégal, a entamé une nouvelle grève de la faim pour protester contre les violences qu’il subit en prison, notamment des passages à tabac de la part des responsables de l’établissement. Transféré plusieurs fois dans différentes prisons, gardé à l'isolement pendant de longues périodes, Soheil Arabi a même été torturé et blessé alors qu'il est devenu la voix des prisonniers dénonçant les conditions de détention catastrophiques dans la prison de Téhéran. 


Le cas du journaliste n’est pas unique en Iran. Le 20 octobre, la journaliste Mehrnoush Tafian a également vu sa condamnation à 100 jours de prison ferme et un an avec sursis confirmée par la justice de la ville d’Ahvaz (sud du pays). Elle avait été arrêtée le 29 octobre 2020, après une convocation devant le tribunal révolutionnaire de la ville d’Ahvaz, puis libérée deux jours plus tard en versant une caution. La journaliste est accusée d’avoir couvert la manifestation des habitants d’un village de la région, qui protestaient contre la destruction de leurs maisons par la fondation religieuse la plus riche du pays.  


Un peu plus tôt, le 26 septembre, une autre femme journaliste, Narges Mohammadi, a annoncé sur sa page Instagram la confirmation de sa condamnation à deux ans et demi de prison ferme, 80 coups de fouet et une amende. “Dès le début de la construction de ce dossier je n'ai participé à aucune audience, je n’avais pas d’avocat et je n’ai pas écrit un mot pour me défendre. Et bien sûr, malgré ma convocation, je ne me suis pas présentée à la prison. Ils peuvent venir me chercher par la force et une fois en prison je dénoncerai cette injustice”, a écrit la journaliste dans son post Instagram.


La reporter et la porte-parole du Centre des défenseurs des droits de l’homme a déjà été emprisonnée durant plusieurs années, entre le 5 mai 2015 et le 8 octobre 2020. En décembre 2019, elle avait été passée à tabac et avait subi un déferlement de violences menées par le directeur de la prison d’Evin et plusieurs gardiens, alors qu’elle protestait contre son transfert dans l’établissement de Zanjan, à 300 km de Téhéran. Depuis sa libération, Narges Mohammadi est également victime d’un véritable harcèlement judiciaire, puisqu’elle a été arrêtée au moins huit fois en un an en raison, notamment, de son engagement auprès des familles de prisonniers d’opinion et de journalistes. 



La république islamique d’Iran figure à la 174e place sur 180 au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2021.

Publié le
Mise à jour le 22.10.2021