Etats-Unis - Le département de la Justice invoque l’« Espionage Act » contre un lanceur d’alerte du FBI

Reporters sans frontières (RSF) exprime son inquiétude après que le département américain de la Justice a inculpé un ex-agent du FBI pour avoir divulgué des informations classifiées à un journaliste. C’est la deuxième fois qu’un lanceur d’alerte est poursuivi dans le cadre de l’Espionage Act depuis l’entrée à la Maison Blanche de Donald Trump.

Le 27 mars 2018, le département américain de la Justice a inculpé Terry Albury, un ex-agent du FBI du Minnesota, dans le cadre de la loi Espionage Act pour avoir communiqué des informations classifiées à un journaliste, selon le Minneapolis Star-Tribune. Terry Albury est visé par deux chefs d’accusation : divulgation non autorisée et rétention d’informations relevant de la sécurité nationale. Malgré des mandats de perquisition, les autorités n’ont pas réussi à identifier l’organe de presse en question. Toutefois, le Star-Tribune a établi un lien entre les accusations pesant sur Albury et la publication en 2017 sur le site d’information en ligne The Intercept d’une série d’articles consacrés aux procédures secrètes mises en place par le FBI pour évaluer ses informateurs.


« Invoquer l’Espionage Act pour criminaliser les lanceurs d’alerte comme s’il s’agissait d’espions est très préoccupant, a déclaré Margaux Ewen, directrice du bureau Amérique du Nord de RSF. Les fuites d’informations sont essentielles au journalisme d’investigation. Les poursuites pour espionnage intentées par le gouvernement américain contre les lanceurs d’alerte mettent directement en question la liberté de la presse. »


Dans une déclaration effectuée le 28 mars, les avocats de Terry Albury ont affirmé que leur client assumait la totale responsabilité de ses actes et qu’« en tant que seul Afro-Américain officiant comme agent de terrain du FBI dans le Minnesota, Terry Albury a agi en vertu d’un engagement sans concession pour une sécurité nationale durable. C’est ce qui l’a poussé à dénoncer les préjugés ancrés et bien connus au sein du FBI. »


Ce n’est pas la première fois qu’un lanceur d’alerte est poursuivi dans le cadre de l’Espionage Act depuis l’accès à la présidence de Donald Trump. En juin 2017, le Département de la justice avait mis en examen une ancienne contractuelle de la NSA, Reality Winner, pour avoir collecté, divulgué ou égaré des informations classées « Secret Défense », à la suite de la publication par The Intercept d’un article dans lequel un document de la NSA démontrait une ingérence russe dans l’élection présidentielle de 2016.


Les accusations contre Terry Albury surviennent moins d’un an après l’annonce par le procureur général Jeff Sessions de mesures répressives contre les lanceurs d’alerte. Lors d’une conférence de presse donnée en août 2017, M. Sessions avait déclaré que les poursuites judiciaires pour fuites d’informations avaient plus que triplé depuis la fin du mandat Obama. Dans les mois qui ont suivi, Jeff Sessions a refusé à plusieurs reprises de garantir la protection des journalistes qui ne divulgueraient pas leurs sources, se déclarant prêt à utiliser la Constitution pour privilégier la sécurité nationale par rapport à la protection des journalistes.


Les Etats-Unis se situent à la 43e place sur 180 pays, selon le classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2017.

Publié le
Mise à jour le 04.05.2018