Emomali Rakhmon à Paris : RSF dénonce la dérive répressive du président du Tadjikistan

​Emmanuel Macron reçoit son homologue du Tadjikistan Emomali Rakhmon vendredi 8 novembre 2019. Celui-ci devrait aussi participer au Forum de Paris sur la Paix. Reporters sans frontières (RSF) appelle les dirigeants européens à conditionner leurs relations avec ce pays au respect de la liberté de la presse.

Читать на русском / Lire en russe


Le président français a décidé de recevoir son homologue du Tadjikistan, Emomali Rakhmon. Cet entretien est une occasion unique d’aborder la question de la liberté de l’information. Garantie par la Constitution tadjike et les traités internationaux, elle est bafouée tous les jours. Le Tadjikistan se vide de ses journalistes indépendants. Plus d’une vingtaine se sont réfugiés à l’étranger depuis 2016 et le début de la dérive répressive du président Emomali Rakhmon. 

“Quels que soient les bénéfices économiques et stratégiques des échanges entre la France et le Tadjikistan, un dialogue franc entre partenaires ne saurait faire l’impasse sur la liberté de la presse, rappelle le bureau Europe de l’Est et Asie centrale de RSF. La dérive actuelle est incompatible avec l’approfondissement des relations entre Paris et Douchanbé. A l’occasion du Forum de Paris sur la Paix, auquel devrait participer Emomali Rakhmon, nous appelons tous les dirigeants européens à conditionner leurs relations avec le Tadjikistan au respect de la liberté de la presse.”

Le pays a perdu 45 places dans le Classement mondial de la liberté de la presse depuis 2015. Cette course aux abîmes s’explique notamment par une censure massive d’Internet. L’agence gouvernementale pour les télécommunications bloque des sites d’information de manière illégale et arbitraire, à l’instar du média indépendant Asia-Plus, l’une de ses cibles favorites. Cette institution sert surtout à renforcer le pouvoir personnel du président Rakhmon.

Par ailleurs, les autorités se sont arrogées le monopole de l'accès au réseau Internet national en 2018. Sites d’information de référence (comme Ferghana ou Akhbor), réseaux sociaux, services de messagerie instantanée, de vidéos comme YouTube, voire parfois Google… Elles n’hésitent pas à fermer l’accès à n’importe quelle ressource sans passer par les fournisseurs. C’est leur premier réflexe face aux difficultés, économique ou sociales, et à la protestations des citoyens.

Harcèlement par les services secrets, intimidations et chantage font partie du quotidien des derniers journalistes qui tentent simplement de faire leur travail. Khaïroullo Mirsaïdov a été emprisonné juste après la publication d’une lettre ouverte dans laquelle il accusait de hauts fonctionnaires de détournement de fonds. Condamné à douze ans de réclusion criminelle le 11 juillet 2018 lors d’un procès inique, il a été libéré après huit mois de détention. Mais cet “exemple” a fonctionné. Ce climat d’intimidation décourage les journalistes d’aborder les sujets sensibles - une autocensure qui favorise l’impunité de tous les corrompus.

Des médias internationaux sont également victimes de pressions. Les journalistes du service en langue tadjik de Radio Free Europe / Radio Liberty (RFE), entre autres, travaillent sous la menace de l’annulation de leurs accréditations.

Le Tadjikistan occupe la 161e place sur 180 au Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2019.

Publié le
Mise à jour le 07.11.2019