Elections américaines : la sécurité des journalistes en question

A deux semaines à peine des élections américaines, l’hostilité manifeste envers les journalistes à travers tout le territoire inquiète au plus au point Reporters sans frontières (RSF) qui appelle à l’arrêt immédiat de ces agressions et à la prise de mesures concrètes – à commencer par la signature, par les candidats, du #PressFreedomPact.

Jamais auparavant dans l'histoire américaine la presse n'a été à ce point sous le feu des critiques et la cible d’attaques. Dernier exemple en date:  deux journalistes couvrant les rassemblements de campagne de Donald Trump au cours des deux dernières semaines ont été victimes de harcèlement pour avoir simplement exercé  leur métier. A Ocala, en Floride, le reporter d’ABC News Will Steakin a été violemment menacé : « ABC News… Une balle dans ta tête, mec. J’en ai une. » Près de Newport Beach, en Californie, une journaliste du L.A. Times s’est fait suivre pendant plusieurs minutes par un homme qui criait « Fake news ! » et encourageait d’autres personnes à l’imiter.

 

Ces incidents ne sont pas isolés. Depuis que les manifestations « Black Lives Matter » ont commencé à secouer le pays  en mai dernier, c’est avec stupéfaction que le public américain a vu des policiers arrêter des journalistes en direct, des agents fédéraux cibler délibérément des photojournalistes avec des balles en caoutchouc et des contre-manifestants agresser physiquement des professionnels des médias – autant de tentatives d’empêcher les journalistes de documenter les faits.

 

« Nous sommes très préoccupés par ces actes d’hostilité et de violence envers les journalistes, tout simplement motivés par le fait qu’ils font leur travail en couvrant les manifestations dans le pays. Jamais auparavant dans l’histoire américaine la presse n’a subi de critiques d’une ampleur aussi alarmante, déclare la directrice des campagnes internationales de RSF, Rebecca Vincent. Ce climat d’agression est représentatif du bilan inquiétant de la liberté de la presse aux Etats-Unis, qui continue de se détériorer à l’approche des élections. Nous appelons les candidats à réagir contre cet état de fait inacceptable et de montrer leur engagement pour la défense de la liberté de la presse en signant le #PressFreedomPact »,  

L’Observatoire américain de la liberté de la presse a recensé pas moins de 856 agressions envers des journalistes couvrant les manifestations pour la seule année 2020. La majorité de ces incidents étaient des attaques physiques spontanées et délibérées visant des journalistes clairement identifiés. Ils se sont produits dans au moins 33 Etats à travers le pays, et notamment à Minneapolis, Washington D.C., Los Angeles, New York, Louisville, Detroit, Denver et Philadelphie.

 

RSF se félicite de la récente décision de la Cour d’appel fédérale du neuvième circuit de maintenir l’interdiction faite aux forces de l’ordre fédérales de cibler des journalistes pendant les manifestations à Portland et salue cette avancée décisive dans la protection de la liberté de la presse. RSF a présenté un amicus curiae dans cette affaire, en soulignant que les attaques de journalistes par les forces de l’ordre ces derniers mois entachent le rôle de pilier de la liberté de la presse dans le monde des Etats-Unis. Mais l’opposition que rencontrent de telles mesures – comme le rejet, par le gouverneur de Californie Gavin Newsom de la loi du Sénat 629, qui prévoyait d’interdire l’arrestation de journalistes lors de manifestations – sont à même de compromettre la sécurité des professionnels de l’information.

 

Quant à la situation générale de la liberté de la presse aux Etats-Unis, elle continue de se dégrader. Alors que les journaux locaux sont dans une situation financière extrêmement difficile, leurs journalistes sont quotidiennement harcelés par une administration qui les qualifie d’« ennemis du peuple » et les accuse de « fake news », et ce même lorsqu’ils s’exposent à des risques physiques pour remplir leur mission. RSF réitère son appel aux responsables publics à, d’une part, assurer la sécurité des journalistes couvrant les manifestations et, d’autre part à enquêter de manière plus approfondie sur ces violations du premier amendement.

 

Pour commencer à inverser ces tendances inquiétantes, RSF invite les candidats aux élections du 3 novembre à signer le #PressFreedomAct, un engagement public à soutenir les principes de la liberté de la presse. Ce pacte offre l’occasion aux responsables politiques américains de réaffirmer leur conviction que la presse libre joue un rôle vital et qu’ils sont décidés à la protéger – et, par là même, de montrer l’exemple au monde entier.

 

Les Etats-Unis occupent la 45e place sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse établi par RSF en 2020.

Pour en savoir plus sur le #PressFreedomAct, rendez-vous sur la page du site dédiée à la campagne ou contactez le responsable de la communication, Collin Boylin : [email protected] ou, par tél, +00 1 (202) 813-9497, poste 3.

Publié le
Mise à jour le 21.10.2020