Des journalistes iraniens condamnés à la prison et à des coups fouet pour des tweets

Le régime iranien renforce sa censure sur le web. Plusieurs journalistes s’exprimant sur les réseaux sociaux viennent d’être condamnés à de lourdes peines de prison et à des coups de fouet. Reporters sans frontières (RSF) dénonce la répression engagée par les autorités Iraniennes contre la liberté d'information sur le net.

Dix ans de prison ferme pour un tweet. C’est la condamnation qui a été prononcée le 22 août 2018 par la cour pénale de Téhéran contre le journaliste du quotidien Jahan Sanat (Le Monde de l’Industrie), Amir Hossein Miresmaili. Selon son avocat, Me Hossein Ahamadi Nyaz, il a été condamné pour «  insulte envers des sacrés de l'Islam », « insulte envers des agents et des responsables du gouvernement», «publication de fausses informations pour troubler l'opinion publique» et «publication d’articles immoraux et contraires à la morale publique». Le journaliste a été également condamné à deux ans d’interdiction d'activité journalistique sur les réseaux sociaux.


Pour un tweet critiquant le puissant mollah fondamentaliste l’ayatollah Sayyid Ahmad Alamolhoda, représentant du guide suprême de la Révolution islamique Ali Khamenei dans la ville de Mashhad, Amir Hossein Miresmaili a été arrêté le 23 avril 2018, avant d’être libéré sous caution 24 jours plus tard, en attendant son jugement. Pour signifier que l'imam Reza, le huitième Imam des Chiites, n'était pas un fondamentaliste et qu’il ressemblait aux jeunes d’aujourd’hui, le journaliste avait tweeté que l’imam avait « mangé des chips et du yaourt et qu’il était donc comme nous». Ses excuses n’ont pas suffit à empêcher les poursuites contre lui. 


« Cette condamnation tout à fait excessive a visiblement pour but d’intimider les journalistes actifs sur les réseaux sociaux, dénonce Reza Moini, responsable du bureau Iran/Afghanistan de RSF. La République islamique, affectée par la corruption et touchée par la crise, use de tous les moyens pour faire taire les voix indépendantes. Or c’est précisément la censure des médias, le contrôle des contenus sur Internet, l'arrestation des journalistes, c’est à dire la politique répressive du régime contre la liberté de la presse appliquée depuis la révolution, qui est l’une des causes de cette crise


Alors qu’il avait été liberé sous caution, Amir Hossein Miresmaili a de nouveau été arrêté le 12 juillet dernier pour la publication d’un autre tweet qui évoquait l’aide apportée aux Palestiniens de Gaza pendant le mois de ramadan par la Fondation de Secours Imam Khomeiny (Imam Khomeini Relief Foundation). Il a de nouveau été libéré sous caution le 10 août dernier.


Le cas du journaliste de Jahan Sanat n’est pas isolé. Le journaliste indépendant et défenseur des droits humain Ejlal Ghavami vient pour sa part d’être accusé de «publication de fausses informations destinées à troubler l'opinion publique» après avoir publié trois articles sur les réseaux sociaux, qui évoquent la situation des prisonniers d'opinion dans la province du Kurdistan. Convoqué le 20 août 2018 par la deuxième chambre du parquet de la ville de Sanandaj (province du Kurdistan iranien), Ejlal Ghavami  a été libéré provisoirement en versant 20 millions Toman de caution. La date de son procès n’a pas encore été fixée.


Parallèlement, le directeur de la chaîne Baneh News sur Telegram, Shoja Hosseinzadeh, a été condamné à 74 coups de fouet par le tribunal pénal de la ville de Baneh (province du Kurdistan iranien). Pour un article satirique reprochant au Président de la République islamique d'Iran Hassan Rohani de ne pas avoir tenu ses promesses électorales, le journaliste-citoyen a été accusé “d’insulte envers le président de la République».


La directrice du blog Paineveste, Hengameh Shahidi, est aussi de toute évidence dans le collimateur de la justice iranienne depuis plus d’un an. Elle a de nouveau été interpellée à la fin du mois de juin 2018, alors qu’elle sortait de l'hôpital. La justice iranienne n'a fait aucune déclaration sur les motifs de cette nouvelle arrestation. Le 15 mai 2018, la journaliste avait annoncé sur son compte Twitter qu’elle avait été convoquée par la 2e chambre du parquet pour la culture et les médias de Téhéran pour « insulte envers le chef du système judiciaire». Quelques jours auparavant, elle avait publié plusieurs tweets sur sa situation en détention pendant sa première arrestation. Hengameh Shahidiavait déjà été interpellée, le 9 mars 2017. Gravement malade, elle avait entamé plusieurs grèves de la faim afin de protester contre son arrestation et ses conditions de détention.


L’Iran se trouve à la 164e position sur 180 pays dans le Classement mondial de la liberté de la presse 2018 de Reporters sans frontières.

Publié le
Updated on 30.08.2018